Ce que j'écris, pourquoi, pour qui et les surprises de mon parcours littéraire

lundi 15 décembre 2025

2022 :mon futur était en marche

Puisque nous sommes dans les prix, continuons sur la lancée avec le recueil 3 fois primé, Mon opium est dans mon cœur (https://claudine-candat-romanciere.blogspot.com/p/mon-opium-est-dans-mon-cur-poesie.html).

Je ne vais pas vous parler de la réception de ces prix, de la joie de monter sur l’estrade et de recevoir son diplôme et les bandeaux rouges qui vont avec.

Le recueil de mes poèmes de jeunesse a d’abord été primé en tant qu’inédit par les Arts Littéraires de Saint-Orens-de-Gameville. C’était en mars 2022 et ce qui m’a décidé de concourir dans la catégorie poésie l’année d’avant c’est l’absence de manifestations littéraires ou une participation conditionnée à la production d’un pass d’abord sanitaire puis vaccinal. N’ayant pas l’intention, en plus de la rédaction d’auto-attestations débiles, de montrer un QR code à un vigile ou à un quelconque citoyen faisant fonction de, je me suis donc abstenue. J’ai mis à profit mon retrait de tout salon et séance de dédicaces pour bâtir mon blog de brique et de broc.

Donc, je concours, je reçois en mars la liste des lauréats et j’ai l’immense surprise de lire mon nom avec une mention spéciale du jury de poésie. Le premier prix est remporté par Nathalie Vincent-Arnaud.

Je suis fort logiquement invitée à la remise des prix, au cocktail et au dîner. Un hic : le pass est toujours obligatoire bien qu’il apparaisse à présent que le vaccin n’empêche ni l’infection ni la transmission. Finalement, je réserve ma place au repas tout en dépêchant le compagnon de chacun de mes livres pour me représenter à la remise des prix. Peu avant la date, l’étau se desserre, les portes sont grandes ouvertes. Je retrouve le bonheur de circuler et de converser, un verre à la main, parmi mes semblables.

Et c’est ce soir-là que je trinquerai avec une représentante de la future maison d’édition de mon recueil de nouvelles, Coup de grain.

Et en 2025, la lauréate de 2022, Nathalie Vincent-Arnaud sera jurée au prix de poésie des Gourmets de Lettres, le dernier en date reçu par Mon opium est dans mon cœur.

Comme quoi la vie peut-être un roman et apporter de bonnes nouvelles. Quant à la poésie, elle est semblable à l’oiseau qui prend son envol, quelle que soit la solidité de la branche. Moins la piste d’envol est sûre, plus l’envie et le besoin de la quitter se fait pressant. Peut-être. Bon, je voulais vous parler autre chose quant à ma poésie. Ce sera pour 2026 car dans le prochain je ferai le bilan de l’année.

Les lauréats 2025 au pied de l'hôtel d'Assézat


mercredi 19 novembre 2025

Le rouge vous va si bien

Les jurés ont rendu leur verdict, les lauréats des grands prix littéraires sont désignés. Leurs éditeurs se réjouiront d’engranger le produit des ventes générées par de si prestigieuses distinctions.

Je n’en dirai pas plus sur le sujet, sauf qu’à la parution de mon premier roman certains libraires l’ont mis en avant par rapport au Goncourt de l’année.

En tant que romancière, je ne suis pas concernée par la question, mes éditeurs étant hors concours. Nous devons, nous et moi, viser moins haut.

Il n’en reste pas moins que, quel que soit le prix, les jurés doivent trier et désigner des lauréats au détriment de leurs concurrents. Les candidats malheureux ont parfois du mal à s’en remettre. C’est normal, ils ont lancé dans la course des poulains qu’ils ont nourris et bouchonnés avec amour.

Il m’est arrivé de recevoir des récompenses : Diabolo pacte, mon premier, primé à sa parution puis à sa réédition par un nouvel éditeur. Mon opium est dans mon cœur, poésie, trois fois primés. J’y reviendrai dans un prochain article.

Revenons à Diabolo pacte. La première édition a été récompensée par les Gourmets de Lettres placés sous l’égide de l’Académie des Jeux Floraux de Toulouse, et sa réédition aux éditions d’Avallon a reçu en 2023 le premier prix du roman de l’Académie des Livres de Toulouse. La couverture en jette avec le bandeau rouge intégré.

On peut toutefois douter de l’impact d’un prix, qui ne fait pas partie des grands, sur les lecteurs potentiels et les ventes.

Or l’autre jour, je téléphone à une librairie de la lointaine couronne toulousaine pour une proposition de dédicace. On m’avertit tout de suite que ça ne se fait pas comme ça. Le libraire, toutefois, part à ma recherche sur la toile et tombe sur la dernière couverture de Diabolo pacte. Le bandeau rouge du prix lui tape dans l’œil. Il me dit que c’est intéressant et qu’il en parlera à l’organisation d’un salon du livre sélectif. Car, en matière de salons, il y a des gradations et des niveaux : ceux qui invitent du beau monde dont je ne fais pas forcément partie même publiée à compte d’éditeur, et ceux ouvert à tous, comptes d’auteur et autoédités compris, souvent pleins à craquer côté auteurs et déserts côté public.

Donc ce salon-là, que vante libraire, serait intéressant. En tout cas, j’avais écrit à l’organisation qui ne s’est pas donné la peine de répondre. Vais-je finir par être invitée ? En tout cas, quand je me suis entendue appelée Claudine, j’ai compris que le bandeau rouge du prix avait fait son effet.



 

mercredi 29 octobre 2025

Mémoires d’une larve

C’est moche une larve avant qu’elle ne se transforme en papillon, si tant est qu’elle en ait les moyens. Il en va de même des romans. L’auteur pond une larve, autrement dit un manuscrit, le cœur battant d’espoir qu’un éditeur accepte de financer sa métamorphose. Je parle bien sûr de l’édition à compte d’éditeur, pas de contrats avec un prestataire de service prêt à publier n’importe quoi pourvu que l’auteur paye ou s’engage à acheter x exemplaires.

Mitraillée de lettres de refus suite à l’envoi de mon 1er essai romanesque, Poussière de sable, je me suis relevée en décidant de sublimer cet échec par l’autodérision. J’ai pris le parti d’en rire et de faire rire les éditeurs et, si possible, de futurs lecteurs. Et j’ai tapé directement à l’écran les premières lignes d’une histoire de pacte avec le Diable dans le milieu de l’édition, entraînée d’une main par mon nabot boiteux d’éditeur, Garin Bressol, et de l’autre par la grotesque Josette Gougeard. Le titre m’est tout de suite apparu : Diabolo pacte.

À peine avais-je posé le point final que je me suis rendue à la remise d’un prix littéraire. Je me suis fait dédicacer le livre primé puis j’ai attendu dans la file d’attente pour aborder l’heureux lauréat :

Je viens d’écrire un roman. Pouvez-vous me donner un conseil ?

Jean-Claude Ponçon m’a répondu :

Pour cela il faudrait que je lise ce que vous écrivez.

Justement, j’avais la disquette (nous étions en 2005) et le fameux fichier sur moi. Un pur hasard.

Je peux vous donner la disquette. Je vous jure que ce n’était pas prémédité.

J’ignore si Jean-Claude m’a cru. En tout cas, il a pris la disquette avec mes coordonnées.

Deux mois s’écoulent. Un jour le téléphone sonne sur mon lieu de travail et j’entends :

― Ponçon.

J’ai failli tomber du fauteuil.

À un certain moment j’ai parlé du livre. Et j’ai été douchée.

― Ce n’est pas un livre.

C’était dit franco de port et d’emballage.

― Mais…

Il y avait un mais.

― Mais vous avez du style et ça c’est bien à vous.

Conclusion : il fallait que je réécrive tout pour que ce soit publiable. Je me remets donc au travail, entamant la version qui trouvera ses éditeurs.

À quelque temps de là, une amie de passage à Toulouse avait commencé à lire Diabolo pacte chez une amie commune ayant apprécié le manuscrit. Je lui ai dit qu’il ne fallait pas lire cette version car j’étais en train de tout refaire. Elle insistait pour l’emporter avec elle dans le train. Je n’étais pas d’accord et j’ai repris ma larve-manuscrite reliée avec une spirale. Elle me l’a carrément arrachée des mains. C’est à ce moment-là que j’ai pris conscience du potentiel de mon ovni déjanté.

Jean-Claude Ponçon est devenu mon parrain littéraire.

Diabolo pacte a été publié par un éditeur du Quartier Latin.

Cet éditeur a fait faillite, il m’arrivait ce qui arrive dans le roman.

Diabolo pacte a été réédité par un éditeur de Montpellier.

Les deux éditions ont reçu un prix littéraire.

Quant aux lecteurs, certains rient en lisant. D’autres lisent en riant. Certains y voient une tragédie. Et vous ?

Quant à moi, dans l'attente de la parution de mon 7ème livre, j’y lis la confirmation de la dureté et des difficultés du monde de l’édition. Je pourrais dire : Antoine Maurier c’est moi. Si vous ne savez pas qui est Antoine Maurier, il est encore temps de rire en lisant Diabolo pacte, sous format papier ou numérique.

éditions d'Avallon à gauche
L'Arganier à droite


samedi 11 octobre 2025

Ce que je dois à Hervé Bazin

Décédé en 1996 sur son lieu de naissance, Angers, voilà des lustres qu’il ne faisait plus parler de lui. Est-ce que Vipère au poing est encore étudié au collège ? Je l’ignore. En tout cas je l’ai lu en classe de 3ème.

Aujourd’hui, son auteur est remis en selle à la faveur de l’enquête-évènement d’Émilie Lanez, Folcoche, le secret de Vipère au Poing.

Des images me reviennent en mémoire : la géniale Alice Sapritch dans le rôle de Folcoche, Folle et cochonne, mère indigne martyrisant ses fils, Chiffe et Brasse-Bouillon. Chiffe, comme son sobriquet l’indique, s’écrase au contraire de Brasse-Bouillon qui résiste. Ce dernier n’est autre qu’Hervé Bazin, l’auteur de cette autobiographie à succès, succès aussi phénoménal qu’épouvantable l’anti-héroïne du livre.

Aujourd’hui ce livre se voit qualifié d’imposture. Folcoche ne serait ni une folle ni une cochonne. Par contre, Brasse-Bouillon serait un pervers affabulateur ayant tâté de l’hôpital psychiatrique. Émilie Lanez réhabilite la figure de cette mère, victime d’un féminicide littéraire. Je dirais même plus en osant le terme de matricide littéraire.

Soit. Mais de là à qualifier Vipère au poing d’imposture littéraire voilà un Rubicon que je ne franchirais pas.

Hervé Bazin est avant tout un écrivain, un conteur, et un écrivain a le droit d’écrire ce qu’il est dans la nécessité d’écrire, dût-il commettre des matricides ou des parricides de papier. Il a parfaitement le droit d’inventer, c’est son métier. Être artiste n’est absolument pas incompatible avec la case psychiatrie. Sur un coup de sang, il est arrivé à certain de se trancher l’oreille et, sur un coup de spleen, à un autre de se pendre à une lanterne.

On regrette déjà que des générations d’adolescents furent invitées à lire cette « imposture ». J’en fais partie et, à la dernière ligne, Merci ma mère ! Je suis celui qui marche, une vipère au poing, je me suis reconnue. Rassurez-vous, ma mère était aimante et adorable. Cette phrase, j’aurais pu la jeter à la face de mon institutrice de CE2 :

Merci madame P ! Je suis celle qui marche une vipère au poing.

En effet, cette année-là, j’ai subi ce que l’on nomme à présent un harcèlement continu de la part d’une enseignante qui me haïssait ouvertement. Comme Brasse-Bouillon, j’ai résisté. Cette expérience m’a inspiré une nouvelle figurant dans mon recueil publié aux éditions Auzas.

Si j’ai attisé votre curiosité et si vous souhaitez en savoir plus, je vous invite à lire Coup de grain et à deviner de quelle nouvelle il est question.



 

dimanche 28 septembre 2025

Volatile

Comme la fumée des cigarettes qu’on n’a plus le droit de fumer. Non fumeuse, je regarde pourtant avec nostalgie ces vieux films où Alain Delon s’en grille une dans une salle d’attente d’hôpital. Une hérésie pour notre société aseptisée ! Or ces images sans odeur lèvent le parfum d’une époque sans qu’elles ne nous fassent tousser.

Volatile comme les idées qui vous trottent par la tête et puis s’effacent. Convoquées, elles ne reviennent pas. Les chipies !

Or ce blog se nourrit d’idées depuis plus de 3 ans. Il tourne et se retourne autour de la littérature en général, de la mienne en particulier. Une publication est une aventure en soi. Quant à l’histoire de ma prochaine parution, Lisbonne avait raison, c’est un roman qui s’étale sur 10 ans et plus, tant l’accès aux éditeurs est semé d’embûches. Avec ce roman picaresque, j’aurais tout vu ! Vous le verrez à votre tour quand je commencerai à vous conter par le menu ma Longue Marche.

Mais revenons à la volatilité de l’idée. Les idées constituant la nourriture des romans, je les note dans un cahier pour ne pas qu’elles s’échappent.

Il y a 2 jours j’aurais dû faire la même chose. Une idée pour le blog mais la flemme de l’écrire dans l’illusion que je la retiendrai. Eh bien non ! La coquine s’est envolée. Impossible d’y remettre la main dessus. Hélas, pas de filet à idées à l’image du filet à papillons des enfants de jadis ! Tout ce dont je me souviens d’elle c’est que c’était une idée, sinon géniale, du moins intéressante.

En poésie aussi il faut avoir des idées. Je participe aux réunions du Gué Semoir, club de poètes toulousains qui se réunit une fois par mois sur un thème choisi. Chaque mois je cherche dans mon recueil paru, Mon opium est dans mon cœur, et dans celui en cours d’écriture un poème correspondant. Parfois, j’en écris un pour l’occasion, trop heureuse que l’inspiration ait daigné me frapper. Pour notre rencontre d’octobre, le thème est Enivré. Normal car la rencontre, sur deux jours, combine poésie et dégustations de vins du Quercy.

Depuis longtemps, j’avais dans l’idée d’écrire un poème sur le papier d’Arménie que ma grand-mère maternelle faisait brûler après le repas du dimanche dans la mansarde qu’elle occupait 10 rue-des-36-Ponts. Les maisons, propriété de l’école Montalembert, ont été rasées depuis pour faire place à une façade de verre.

Bonne-Maman est partie en 1987. Des lieux où elle a vécu à Toulouse il ne reste rien, sauf le souvenir et la nostalgie. Alors que rien de ce que je couchais sur le papier n’était à la hauteur de mes émotions, soudain ces vers m’ont foudroyée :

 

Que l’air du temps veuille me rendre

Ce mélange au goût métissé

De l’encens qui se fiance

À la fumée d’insolentes gauloises…

Pour lire la suite suivre la fumée.



mardi 2 septembre 2025

Alerte accidents d’ego

Pouvant conduire à des séquelles permanentes : blessures narcissiques, le miroir est fêlé, une écharde s’est plantée dans l’œil. La représentation de soi en prend un sacré coup.

Les ambitions artistiques constituent un terrain éminemment favorable à de tels accidents. Je l’ai vécu avec mon père incapable de vendre un seul tableau ou une seule sculpture parce qu’il ne savait pas vendre : ce blocage, qu’il m’a transmis, m’a longtemps bloquée derrière la table de dédicace tandis qu’autour de moi ça signait à tour de bras. Jusqu’au jour où je me suis décidée à inverser la tendance : je me suis mise à aborder les gens et à leur parler, bien que ce ne soit pas ma pente naturelle. Ça va mieux depuis, mais je ne me sens pas à l’aise en salon du livre au milieu de la concurrence. Il n’est qu’à relire le dernier article que le sujet m’a inspiré : https://claudine-candat-romanciere.blogspot.com/2025/05/les-divas-du-salon.html

Cette situation, à laquelle je ne m’attendais pas quand je n’étais pas encore publiée, m’a infligé son lot de blessures narcissiques.

J’ai remarqué que le résultat des concours et prix littéraires avait sur d’autres le même effet dévastateur que l’ambiance des salons du livre sur mon moral. De ce point de vue-là, je suis blindée. J’accueille avec joie les récompenses et ne sort pas déprimée du fait de n’être pas primée.

En ce qui concerne l’ego, je tiens à être absolument sincère et à rétablir la vérité. Non, ce n’est pas mon ego qui est vexé comme un dindon quand mes livres ne décollent pas de la table. Je suis meurtrie pour toutes ces entités-livres que j’ai aidé à venir au monde, qu’elles se nomment Diabolo pacte, Coup de grain ou Elwig de l’Auberge Froide. C’est le meilleur de moi-même, mais qui s’est détaché de moi, du MOI. Comme aux enfants, des ailes leur poussent dans le dos. Comme les enfants, nos personnages s’émancipent et n’en font qu’à leur tête sans nous demander notre avis.

Le lecteur ne butine-t-il pas un autre livre que celui que nous avons écrit ?

J’ai mal pour elles, persuadée sur le moment que ce n’est pas moi, mais elles qui sont victimes d’une injustice, d’un déficit de notoriété qui réduit l’auteur à vendre à la criée le meilleur de lui-même.



 

jeudi 14 août 2025

Les Toulousains de Toulouse

Pour un titre, ça c’est un titre. C’est surtout le nom d’une association fondée en 1906, Les Toulousains de Toulouse et amis du vieux Toulouse, ayant pour objet de grouper tous ceux qu’intéressent la beauté de notre ville, ancienne ou moderne…

La société est propriétaire de l’hôtel Dumay qui abrite le musée du vieux Toulouse et publie L’Auta, 10 fois par an. La lecture en est passionnante à qui aime s’entendre conter les évènements et les anecdotes, les personnages et les lieux marquants de notre ville. Par exemple, la mort du docteur Gérard Marchant, le kiosque à musique du Grand Rond. Pour vous donner une idée.

Quel rapport avec mes travaux d’écriture, mettant rarement les pieds à Toulouse dans mes fictions ? Dans mes romans 2 ou 3 fois, si peu dans ma poésie.

Au mois de juin, j’ai présenté Mon opium est dans mon cœur dans une association proche de mon domicile. Une belle après-midi avec projections sur écran et lecture de poèmes, dont mon Toulouse. Des vers qui ont eu l’heur de plaire.

Dans l’assistance, un monsieur prend la parole pour me conseiller de parler de mon recueil aux Toulousains de Toulouse. Je vais donc sur leur site et découvre qu’ils organisent prochainement une visite du Buscat, un beau quartier entre le canal du Midi et le Jardin des Plantes regorgeant de belles demeures. Jusqu’à mes deux ans et demi, j’ai grandi dans l’une d’elles, avenue Crampel, chez mes arrière-grands-parents maternels dont je me souviens très bien. La maison appartenait à Mémé qui en avait hérité d’une parente l’ayant recueillie, orpheline, avec sa mère, veuve. En 1906 elle y a mis au monde Paul, son fils aîné, mon grand-père. Je suis encore nostalgique des massifs de fleurs sur lesquels veillait Bon Papa.

Cette maison a finalement été vendue aux enchères en 1971 pour éviter une mise sous écrou à mon grand oncle, coupable de détournement de fonds vis-à-vis de la société d’assurance dont il était directeur. Mémé avait toujours dit : « Les femmes le perdront ! » Heureusement, elle n’était plus là pour assister au désastre, ni Bon Papa d’ailleurs.

Donc, fraîche adhérente aux Toulousains de Toulouse, je m’inscris à la visite du Buscat avec rendez-vous rue des-36-ponts. Encore un signe : ma grand-mère maternelle, la femme de Paul, habitait au n°10. Le lot, occupé longtemps par l’école privée Montalembert, a été rasé pour laisser la place à des façades de verre. Et voilà le lien avec ma littérature.

La vie de ma grand-mère est un roman que je n’ai pas l’intention d’écrire, encore moins de publier. Je suis seulement en train d’en faire un de sa lignée maternelle, 100% basque, remontant jusqu’à des ancêtres dont je sais si peu que je fais ce que je sais faire : romancer.

Delphine, mon arrière-grand-mère, désireuse de voyager, a finalement quitté Euskal Herria pour se fixer à Toulouse où elle a rencontré Émile, mon arrière-grand-père, peintre décorateur de 10 ans son cadet et dont l’autoportrait projette une ombre tutélaire sur mon écritoire. Pour ressusciter le pays basque d’antan, je me suis plongée dans une profusion d’archives et de livres. J’apprends la langue de mes ancêtres et de mes personnages, certes un basque académique mais qui m’aide à me glisser dans leur peau. Je trouve l’expérience exaltante.

Pour le Toulouse en pleine mutation de la IIIème République, c’est une autre paire de manches. L’occitan est quasi inconnu dans ma famille, à part quelques mots de patois toulousain. Rien de tel que la visite du musée et des quartiers et la lecture de l’Auta pour me mettre dans le bain.

Depuis la terrasse des Galeries Lafayette


 

mercredi 16 juillet 2025

Les Armstrong de la littérature

Des Armstrong il en pousse pléthore aux USA. Comme on dit chez nous, il n’y a pas qu’un âne qui s’appelle Martin.

Parmi la foultitude de Armstrong, deux se détachent du lot, voire du peloton. Le premier, Neil de son prénom, est le premier astronaute à avoir posé le pied sur la lune et réalisé le rêve de Jules Verne (De la terre à la lune), H.G. Wells (Les Premiers Hommes dans la Lune), Georges Méliès (Voyage dans la Lune). Jules en a rêvé en 1865, Neil l’a fait en 1969. Comme dans Tintin, on a marché sur la lune.

Le deuxième Armstrong escaladait sur son vélo les grands cols à la vitesse d’une fusée, laissant sur place ses malheureux poursuivants. Cet Arsmtrong-là se prénommait Lance et, sept années durant, assomma la plus grande course cycliste de la planète Terre, à savoir le Tour de France, et par la même occasion les téléspectateurs. Lance était fort, invincible mais propre. Jusqu’à l’heure de la révélation : dopé et suspecté de dopage mécanique. Dans ce cas ce n’est pas le coureur qui est chargé mais sa monture, en l’occurrence d’un petit moteur bien caché. Il a fallu des années pour déboulonner le tricheur de son piédestal de champion !

Mais pourquoi je vous parle de ces deux Américains ? Quel rapport avec le sujet principal de ce blog, la littérature ?

Un écrivain peut-il être dopé, inspiré par les Paradis artificiels, quand il épanche ses rêves, ses souffrances, ses réflexions sur le page, celle-ci fût-elle de pixels ? Les mots lui sortent des tripes. Est-il publié ou non ? Est-il bankable ou non ? Est-il goncourable ou non ? Il l’ignore mais est en pleine conscience qu’au moment décrire c’est son sang d’encre qui imbibe le papier. La création le rend euphorique : il marche sur les nuages, il fait des bonds sur la lune. Il est NEIL.

Lance, quant à lui, remise de temps à autre le vélo au garage pour se consacrer à l’ambition de toute une vie : l’écriture. Lance est moderne, moins borné que ces écrivains besogneux qui cent fois sur le métier remettent leur ouvrage. Qui se crèvent à travailler l’incipit et la fin, vivent dans la peau de leurs personnages, cisèlent chaque phrase, bref se décarcassent sans savoir si le produit de leur enthousiasme trouvera un éditeur puis des lecteurs.

Alors que Lance, lui, a trouvé la solution qui lui évite bien des affres et lui permet de sortir le vélo plutôt que de rester coincé devant une page blanche ou un écran. Lance fait appel à son nègre virtuel qui n’aura jamais l’idée de le traîner devant les tribunaux : l’intelligence artificielle. Y a qu’à lui demander, elle va pomper partout et pondre quelque chose.

Mais où est le plaisir de la création ? Que ressent-on quand on décroche un titre en trichant ? Je l’ignore, car je ne me suis jamais dopée pour obtenir mes 5 brevets cyclo-montagnards français dans les 5 massifs.

Quant à mes six livres, bientôt sept, ils sont garantis sans IA et sans édulcorant.

Sur les hauteurs de Montgiscard (31)


lundi 16 juin 2025

Livres en rafale

Les chiffres d’Occitanie Livre et Lecture sont impressionnants : en France sortent par jour 313 nouveautés. La mitraillette éditoriale ne s’enraye pas et les libraires sont submergés, ce qui aboutit à un pilonnage de 26 000 tonnes de livres neufs par an.

Sans parler des autoédités, les auteurs publient un livre par an, ce qui m’a amenée à m’interroger sur ce blog à propos d’auteurs connus qui servent et resservent du réchauffé tous les ans. https://claudine-candat-romanciere.blogspot.com/2024/02/ia-ou-hi-han.html

C’est que dans un monde où il faut tirer plus vite que son ombre, les balles fussent-elles d’encre et de papier, l’auteur est sommé de produire à la chaîne pour ne pas sombrer dans l’oubli.

Mais laissons tomber ces lièvres pour nous pencher sur le cas d’une petite tortue qui ne risque pas d’être oubliée dans la mesure où elle n’est pas connue : MOI.

Les chiffres sont implacables : notre tortue bat des records de lenteur.

Cinq ans pour accoucher de Poussière de sable, monument de science-fiction qui, en bout de course, sera balayé par une rafale de refus de la part des éditeurs. Commencée début 2001, les deux premiers volets de la saga seront publiés en 2018 et 2022 par Rroyzz éditions qui mettra la clé sous la porte fin 2002.

Né de la déception et de la rage d’être publiée, Diabolo pacte (le pacte avec le Diable dans le milieu de l’éditions) aura été écrit à la vitesse de l’éclair, moins de 2 ans. Commencé en juin 2005, il verra le jour en août 2009 chez un éditeur qui fera faillite moins de 2 ans plus tard. Il a été réédité en juin 2023 par les éditions d’Avallon. https://claudine-candat-romanciere.blogspot.com/p/diabolo-pacte.html

L’histoire de mon 2ème roman publié, Elwig de l'Auberge Froide, est un roman-fleuve. 4 ans pour écrire une première mouture. Je reçois des refus personnalisés. Le roman intéresse Plon qui trouve le titre très bon. Je suis reçue en avril 2012 à Paris par un éditeur très aimable dont le bureau disparaît sous les manuscrits rescapés de l’écrémage. J’ai retravaillé le roman mais il est définitivement refusé. Je décide alors de bannir le fantastique de l’histoire et de la réécrire de façon réaliste par le biais de la psychogénéalogie. En même temps, j’adresse Elwig de l’Auberge Froide à un éditeur genevois qui ne publie que du roman. Je continue à rédiger la nouvelle mouture quand, en avril 2013, Genève me contacte. En février 2014, mon 2ème roman paraît aux éditions Pierre Philippe, couronnant le résultat de 6 années d’écriture. Or ce roman paru il y a plus de 10 ans est toujours distribué, actif dans le circuit commercial, que ce soit sous format papier ou e-pub.

La sortie de Poussière de sable est marquée par la maladie de ma mère et les deux ans de crise covidiste qui me tiendront loin de la presse et des salons et au bout de laquelle mon éditeur de SF pliera boutique.

Et puis le rythme de mes publications s’accélère. Il faut dire que j’ai poussé à la roue. En 2023, les éditions d'Avallon ressuscitent Diabolo pacte et les éditions Auzas publient Coup de grain, 10 nouvelles inspirées du réel. En 2024, paraît aux éditions Il est Midi un recueil de mes poèmes de jeunesse, Mon opium est dans mon cœur.

En 2025, en août, paraîtra aux éditions du 81 mon septième livre, Lisbonne avait raison, roman historique picaresque : dix ans de travail à remettre plus de cent fois l’ouvrage sur le métier, un parcours tumultueux pour enfin arriver à bon port. Je vous ferai signe quand l’heure viendra d’embarquer à bord.



jeudi 29 mai 2025

Des faits de société

Pour une fois, le blog puise son inspiration dans la pub, celle qu’on nous assène à la télé. Le lien avec la littérature ?

Lorsque je présente Diabolo pacte, derrière ma table, je cite, outre le pacte avec le diable dans le domaine de l’édition, un aspect plus grave et plus profond : un livre sur les livres avec des faits de société. Certes, on revisite Mai 68 et pas seulement Étudiants, dian dian, mais aussi le vécu des classes laborieuses d’alors dans le Nord de la France. On s’attarde aussi sur le sort des comédiens qui n’arrivent pas à percer et se commettent dans la publicité après avoir abandonné l’ambition de brûler les planches en jouant des classiques ou des créations avant-gardistes.

La preuve par le livre : …Je me gardai d’ajouter que je n’avais pas envie de me transformer chaque soir en rhinocéros ou d’attendre une cantatrice chauve qui n’arrivait jamais. J’ai d’ailleurs reconnu à la télévision, en écarquillant les yeux, certains comédiens de la Troupe des Têtes Brûlées, devenus des artistes engagés contre le cholestérol.

Devant la télé, je me relis intérieurement. Cet acteur entre deux âges souhaiterait peut-être jouer la scène de la cassette plutôt que de vanter les mérites d’une banque sans actionnaires au service de ses clients. Autant s’affubler d’une barbe blanche et d’une houppelande rouge !

Ces comédiennes préfèreraient sans doute se crêper le chignon pour autre chose que des choupiprix ou riquiprix. Apprendre à articuler avec un crayon dans la bouche des heures entières pour ça !

Quant à adresser une moue désapprobatrice au jeune homme qui s’apprête à commander au barman le coup de l’étrier, c’est du grand jeu face à la performance d’un Jean Gabin enchaînant verre sur verre en compagnie de Belmondo dans Un singe en hiver. Qu’aurait pensé Antoine Blondin ?

Ne parlons pas du dialogue de la tomate non assurée !

Or, derrière ces pubs dans lesquelles les Français font figure de parfaits crétins au QI aussi plat que leur compte en banque, il y a des créatifs, des vrais, qui ont peut-être dans leurs tiroirs une Conjuration des imbéciles ou un Cher connard.

Peut-être regarderez-vous ces pubs avec un œil neuf, surtout celle sur le vaccin contre le zona. Chapeau l’artiste ! Filmer en noir et blanc (ça s’impose pour cadrer des plus de 65 ans) et passer soudain à la couleur, juste au moment de l’apparition des pustules, pour instiller l’effroi, ça frise le génie.

Et la littérature, b…l ! Mais c’est évident, la preuve par Diabolo pacte : Ce qui vaut pour l’acteur vaut aussi pour l’écrivain qui fait vivre avec les mots de l’état et de l’action les personnages que l’acteur anime avec son propre corps.

Merci de m’avoir lue. Vous serez encore plus remerciés si vous me faisiez de la pub.



samedi 10 mai 2025

Les divas du salon

Pas celui de danse mais du livre. Et parfois c’est rock and roll.

Vous êtes auteurs, pas besoin de vous faire un dessin. Vous écrivez ou pas, vous lisez, du moins j’espère. Quoique. Donc vous êtes sur place, salle des fêtes, halle ou barnum (des fois, c’est vraiment le cirque), en qualité de visiteur avec le dessein, ou pas, de faire quelques emplettes devant les tables sur lesquelles les auteurs ont installé leur production.

Vous tournez, vous vous arrêtez, ou bien vous reculez dans la crainte d’être happé par cet illustre inconnu qui a quelque chose à vendre. Si vous connaissez la solitude du représentant en aspirateurs, vous n’êtes pas loin de saisir la condition de cet être fragile qui ne vit certainement pas de sa plume qu’il bichonne parfois jour et nuit au mépris du boire et du manger afin qu’elle accouche au bout de mois ou d’années de gestation d’une œuvre de l’esprit pétrie d’encre et de papier.

Elle vous attire, mais ça tombe mal, vous avez oublié les lunettes ou le chéquier.

Elle ne vous attire pas mais vous avez envie de parler, et vous êtes loquace alors que l’être derrière sa table frise l’autisme. D’ailleurs c’est peut-être pour ça qu’il écrit.

Vous lui parlez de vous, persuadé que vous le passionnez, ou vous êtes intarissable sur BM ou AN ou MB, dont la notoriété dépasse les frontières. Or la réputation de votre interlocuteur dépasse avec peine les limites du département ou de sa famille.

Justement un peut-être futur lecteur est en train de feuilleter un de ses livres. Vous connaissez le curieux et vous le happez en le saluant, l’entraînant hors de son cercle d’attraction. L’ex-futur lecteur s’en désintéresse aussitôt et poursuit son chemin dans les allées. Vous ignorez tous deux qu’un brouillard de déception colle à vos pas.

Des anecdotes du cru il en existe des tombereaux. Intéressent-elles seulement les lecteurs putatifs ? C’est pour eux que nous nous escrimons, pour eux que nous trimballons des tombereaux de livres à mettre sur les tables des salons dans l’espoir de choper la crampe de l’écrivain qui enchaîne les dédicaces.



 

samedi 19 avril 2025

J’ai la rage

Depuis quelques semaines, la gamelle du dlog est dramatiquement vide. Si ça continue, le blog va mourir d’inanition. Il est temps que je lui dégote un os à ronger. Sinon il va me mordre. Et si je chopais la rage ?

La rage, il y a de quoi l’avoir en parcourant les nouvelles autour de la littérature.

Les Français liraient moins. On s’en doutait. Voilà des années qu’on constate qu’il y a de plus en plus de gens qui écrivent pour des lecteurs en nombre décroissant. Une nouvelle espèce a même émergé dans la jungle de la surproduction éditoriale : les auteurs du confinement. Bon ! On savait déjà que l’oisiveté était mère de tous les vices. Rien d’étonnant à ce que l’écriture ait vocation à devenir une drogue. Même sans lecteur, impossible d’arrêter. Il nous faut notre dose. Notre ligne !

Donc, c’est un triste constat : les Français, qui déjà ne lisaient pas beaucoup, lisent encore moins. Et c’est encore pire ! Un dimanche, dans un salon du livre, un confrère m’a montré des statistiques à même de saper le moral des plus optimistes. Non seulement les Français lisent peu, mais en plus ils sont en queue de liste pour la lecture parmi d’autres pays d’Europe. Est-ce à relier avec le classement Pisa des résultats scolaires dans lequel nous régressons chaque année dans le fond de la classe ?

Il ne me reste plus que l’espoir d’être traduite et de m’installer un moment à l’étranger pour pousser la promo. Mon rêve ! Que Elwig de l’Auberge Froide soit traduite dans la langue d’Elwig et de Franz ! Que ma saga de science-fiction, Poussière de sable, soit traduite dans la langue de Robert Silverberg et de Philip K. Dick et que la suite de mon aventure, Lisbonne avait raison, puisse s’exprimer, comme Lorenzo Azzopardi, dans la langue d’Italo Svevo, de Cervantès et de José Saramago. L’Europe du Sud, c’est pas mal, non, pour chercher les Lumières ?



mercredi 2 avril 2025

Vivre en poésie

Mon rapport à la poésie n’est pas une ligne droite, un canal filant droit balisé par des écluses autorisant la circulation de péniches plus ou moins chargées. J’y suis revenue après une longue éclipse. Ce retour m’a poussée à chercher un éditeur pour mes poèmes de jeunesse, Mon opium est dans mon cœur.

J’approchais les trente ans et je me croyais définitivement morte à la poésie. Quand j’ai remué ciel et terre pour être éditée ce n’était pas pour placer du vers, mais du roman.

Puis, l’occasion faisant le larron, j’ai tenté des poèmes de circonstances qui ont plu. Alors j’ai continué. De temps à autre jaillit de ma plume quelque forme poétique. Le jet. Rien à voir avec le travail de bâtisseur qu’induit le roman.

La parution de mon recueil m’a valu entre autre l’invitation du poète franco-suédois, Svante Svahnström, à son club de poésie qui se réunit un jeudi par mois à la Maison d’Occitanie à Toulouse.

J’ai apprécié de déguster les poèmes des autres participants.

Le dernier jeudi était invitée une poétesse au nom prédestiné qu’il ne lui a pas toujours été facile de porter, Elisabeth Aragon, maître ès jeux au sein de l’Académie des Jeux Floraux. Lecture à haute voix en espagnol et en français. Un régal !

Un jeune invité que je ne connaissais pas, appelons-le Théo car c’est ainsi qu’il s’est présenté et a, théâtralement, mis en voix deux poèmes. J’ai reçu deux coups de poing dans la figure. KO assise.

Parenthèse : les poèmes des participants, dont ceux d’Elisabeth et de Théo, sont mis en ligne sur le site du Gué Semoir alimenté par Svante.

La réunion s’est achevée par un repas au restau indien. Entre une samossa et un délice aux mangues nous avons causé… poésie et poètes. Et voilà qu’une expression et un mode de vie m’interpelle : vivre en poésie. Autour de cette table, la vie de bohême est pour certains une réalité, aussi tangible que le chômage. Il est vrai qu’un homme normal, et pourquoi pas une femme ?, peut se passer de manger et de boire pendant deux jours, de poésie jamais (je cite Charles Baudelaire de mémoire). Et de me sentir du côté sage de la barrière, moi qui fais une incursion en poésie entre deux chapitres de roman. La nostalgie m’étreint. Où es-tu, jeunesse, quand je tissais mes vers sur le rouet du vent et que je me confectionnais un curriculum rempli de trous ? Non, je ne regrette pas d’avoir vécu en poésie, sans salaire et sans revenus. Mes impôts et ma CSG en sont allégés.

Mes cahiers de jeunesse


 

mardi 18 mars 2025

La bosse du commerce

Un sujet qui intéressera les auteurs exposant leurs œuvres dans les salons du livre, tous avides qu’un de leurs titres trouve preneur. Vous n’êtes pas auteur mais lecteur fréquentant les salons du livre ; vous n’êtes ni lecteur ni auteur, mais vous avez été vendeur d’aspirateurs ou d’assurances une fois dans votre vie, cet article peut vous parler. Le livre est certes une œuvre de l’esprit, mais elle doit se vendre. Faute de lectorat, elle restera lettre morte.

Je lisais l’échange, sur les réseaux, entre auteurs, bien sûr inconnus – la notoriété assurant les ventes en librairie et les files d’attente devant la table de dédicaces – et dont les avis différaient sur la conduite à tenir. Pour l’un, il fallait rester debout et interpeler le chaland, surtout pas roupiller derrière un téléphone. Pour l’autre, tenter d’alpaguer le putatif lecteur aurait l’effet contraire : le faire fuir non seulement de la table de l’alpagueur mais aussi des tables voisines. Ah ! Le cochon !

Je vous livre mon expérience. Longtemps je me suis tenue modestement derrière la table, osant à peine un bonjour. Non par timidité, mais parce que j’estimais qu’un livre n’étant pas une savonnette je ne pouvais me muer en bateleur de foire. Et le lecteur me glissait entre les mains, pour s’emparer du livre d’un voisin doté d’une bonne tchatche.

Pourtant, par respect de mes futurs lecteurs, je me présente toujours sur mon 31 (quand on est de Toulouse !) et armée d’un beau stylo quand d’autres se foulent le poignet en maniant un simple bic.

Il m’est arrivé plusieurs fois de vendre Diabolo pacte ou Elwig de l’Auberge Froide sans prononcer un mot tant le talent de mes éditeurs avait su concocter un quatrième de couverture attrayant.

Et puis, un beau jour, lassée de me déplacer pour vendre 2 ou 3 livres, quand ce n’était le zéro absolu, j’ai décidé de changer de méthode.

Debout, j’ose aborder les passants, leur proposant de leur parler de mes livres. Je précise que toutes mes publications ont été sélectionnés par des éditeurs et tient à leur disposition, pour chacune, un jeu de quelques critiques et chroniques. Quand on me dit : Vous ne pouvez pas dire que c’est mauvais puisque vous en êtes l’auteur, je suis à même de leur prouver que d’autres, que je n’ai jamais rencontrés, en pensent du bien. Plus d’une fois on m’a demandé une dédicace en me précisant qu’on se passait de la critique pour choisir ses lectures.

Je me suis aperçue très vite que la roue avait tourné et que l’époque où je me déplaçais pour des nèfles était révolue.

Il m’a été dit par un monsieur auquel j’ai dédicacé deux livres :

Si vous ne m’aviez pas abordé, je serais passé à côté.

J’en viens à la rencontre la plus émouvante. Librairie d’un supermarché. On y circule avec des caddies qu’on remplit de plein d’autres choses que de nourriture spirituelle.

J’aborde une dame qui s’intéresse à mon duo qui fait du bien. Elle me raconte qu’elle a été peintre et à la tête d’une entreprise de graphisme, que les choses ont mal tourné pour elle et qu’elle s’est retrouvée en clinique. Elle peine à récupérer des traitements et me remercie de lui avoir tendu la main. Elle a ainsi eu l’occasion de parler et de se confier. J’espère que mon Coup de grain lui aura donné un coup de fouet.

 


mercredi 5 mars 2025

Je suis transgenre

Littérairement parlant. La preuve par les livres : de la poésie à la SF, de la nouvelle au roman contemporain, du thriller au roman picaresque (pour juillet). Éclectique est plus neutre mais moins rigolo. Ça fait en effet rire le public qui, réjoui, a peut-être envie de jeter un œil dans mes écrits. Tel est le but de tout auteur : accumuler les lecteurs.

Traduit en langue inclusive, ça donne ça : le but de tout.e auteurices est d’accumuler les lecteurices. On peut applaudir des deux mains, en rire ou en pleurer. En tout cas, ça écorche les oreilles. Et j’ai l’ouïe assez fine pour passer mes textes, du plus court au plus long, au gueuloir.

J’ai l’ouïe si délicate que ne féminiserai jamais ce mot splendide d’écrivain. Quand Simone de Beauvoir va plaider la cause de Violette Leduc, elle déclare : « Violette Leduc est un grand écrivain ». Et Simone de Beauvoir n’a de leçons de féminisme à recevoir de quiconque.

Cent fois je me suis exprimée sur ce que m’inspirait le mot autrice, moi qui aspire à un rôle de locomautrice, notamment en 2023 https://claudine-candat-romanciere.blogspot.com/search/label/autrice.

J’écris des fictions qui mettent en scène des personnages aux parcours et aux psychés variés. Avec mon 1er essai romanesque, Poussière de sable, je me suis glissée sous les plumes de grands oiseaux dotés de pouvoir psy et s’exprimant en dégageant de la lumière. Quand j’ai achevé Diabolo pacte je me suis écriée (intérieurement) : Antoine Maurier, c’est moi ! Or mon Antoine n’est pas seulement auteur de science-fiction mais un homosexuel dont le lecteur découvre le cheminement depuis l’enfance. Je me suis glissée dans sa peau, comme une actrice épouse les personnages qu’elle incarne sur scène.

Je suis certes femme mais, en qualité de romancière, mes personnages incarnent tous les genres. Ma condition de femme – comme dirait Simone de Beauvoir – ne m’enferme pas dans des récurrences. J’écris, et je m’évade hors des frontières du temps, des âges et des sexes. J’aspire modestement à l’état d’écrivain. Si le milieu littéraire m’en attribuait un jour le statut, j’en serais extrêmement fière.



vendredi 21 février 2025

Des zéros et des héros

Un simple H aspiré sépare les héros des zéros. Si le thème m’a inspirée c’est qu’il a fait l’objet d’un débat animé sur Facebook avec une citation de je ne sais plus qui, à savoir que la jeunesse se devrait d’être héroïque.

De jeunes héroïques, la terre de Verdun et d’ailleurs en regorge. Étaient-ils d’ailleurs héroïques, ces jeunes gens faits pour l’amour qui montaient au casse-pipe, l’esprit capitonné par des cocktails de drogues ? Une guerre des tranchées fait rage en ce moment même et, des fossés d’Ukraine, émergent des têtes blanches qui n’auraient jamais pensé risquer leur peau à l’âge où on prend la retraite.

L’héroïsme n’est d’ailleurs pas l’apanage de la jeunesse. À Toulouse, la Résistance comptait, entre autres figures héroïques, une jeune fille de 18 ans, Angèle Bettini Del Rio, un homme dans la fleur de l’âge, Forain François Verdier, qui refusa de parler sous la torture, et une vieille dame, du réseau Françoise, d’après son nom de Résistante, dont Greg Lamazères a campé l’action héroïque dans La vieille dame du war office.

Quant aux zéros, il est possible qu’ils pullulent, quoique des circonstances extrêmes soient à même de transformer un z en h.

Et la littérature dans tout ça ? Et surtout la seule dont je puisse parler de l’intérieur : la mienne. Combien de héros et d’héroïnes ? Combien d’anti-héros ? Je n’ai jamais fait le compte des divisions de fantassins et de cavaliers que j’ai expédiés sur le front à la seule fin de prendre d’assaut l’intérêt des lecteurs.

Laissons de côté la SF (Poussière de sable étant épuisé sans avoir renoncé à renaître) et Elwig de l’Auberge Froide dont l’héroïne de cape et d’épée a été largement commentée dans le blog.

Tournons-nous vers Diabolo pacte dont les protagonistes évoluent dans un milieu très sélectif : l’édition. Prenons Garin Bressol, ainsi prénommé en hommage à un village situé dans l’ascension du col de Peyresourde. Notre Garin, gnome boiteux et prof de français dans un collège de banlieue, s’attaque à l’Himalaya : faire publier sa science-fiction. Las ! Il essuie et les lettres de refus des éditeurs et les quolibets de ses élèves. Heureusement, le Diable a plus d’un tour dans son sac à malices et a tôt fait de transformer notre prof martyre, par la grâce d’une fronde virtuelle, en don Juan et en éditeur à succès.

Tournons-nous vers Coup de grain et sa nouvelle Alexander the Great. Largement romancée, l’histoire est née de la nécessité que j’éprouvais depuis des années de rendre hommage à un véritable héros. Américain et anonyme, je l’ai prénommé Alexandre, comme le Grand, ce grand homme qui, dans les eaux glacés du Potomac où un avion de ligne s’était crashé, avait maintes fois refusé son tour d’hélitreuillage au bénéfice de passagers et de passagères qui ne lui étaient rien, mais lui parurent plus importants que sa propre peau à l’occasion de cette situation extrême à la vie à la mort.

Des flots d’encre peuvent couler sur le sujet, inépuisables. L’anti-héros est-il plus fascinant que le héros ? Quant à l’humble locomautrice que je suis, elle en est venue au constat qu’un héros trop parfait peut barber. Des zones d’ombre et de petites ou grandes lâchetés lui donnent de la densité. Quant aux anti-héros, il peut faire roupiller le lecteur à force d’échecs et de défaites attendus. Qui sait ce dont ils sont capables ? Même pas leur auteur !

 


lundi 10 février 2025

Où dédicace rime avec camarade de classe

Une signature en librairie ou en salon du livre est un sport qui sollicite quelque énergie, je dirais même plus, beaucoup d’énergie, un match dont on ne connaît guère le score final. Combien de livres signés à la fin de la journée ?

Dernièrement, j’étais installée devant l’espace librairie d’un Intermarché avec mon duo de livres qui font du bien, Diabolo pacte, côté roman, et Coup de grain, côté nouvelles. Ma dédicace du mois de juin ayant été un franc succès, je suis revenue en février avec le même duo mais vêtue en conséquence, collants roses douillets et boots fourrés.

J’attendais la première signature, source d’optimisme pour la suite. Une dame s’avance vers moi et déclare :

Je vous connais.

N’étant pas physionomiste, ce qui me vaut moult quiproquos et désagréments, je m’imagine qu’il doit s’agir d’une rencontre en salon du livre. Mais elle poursuit :

― Je vous ai reconnue et votre nom m’a confirmé qu’on se connaît. Nous étions camarade de classe.

Bien sûr, moi je n’ai reconnu personne. Je lui demande son nom et, derrière son masque et les lustres écoulés, je revois la jeune fille, la camarade de classe du lycée Saint-Sernin. D’être reconnue, voilà qui me soulage face à l’âge qui avance et nous en met plein la figure.

Des détails me reviennent : son adresse d’alors, rue des Potiers, ses cours de danse et son spectacle auquel j’avais assisté au théâtre Daniel Sorano.

Anne, car c’est son prénom, a fait lettres sups et s’est vouée à sa passion, l’enseignement. Côté universitaire et professionnel, je ne puis me vanter d’une telle carrière. Admise en hypokhâgne, j’ai choisi la fac d’allemand, ce qui m’a permis de décrocher une bourse du ministère des affaires étrangères pour étudier à Stuttgart. Dans le top 3 de ma promo de la fac d’allemand, je me suis offert le luxe d’un CV à trous et d’une reconversion dans le droit du travail. Les 2 autres sont devenus profs de fac. Je ne les ai jamais enviés car le droit du travail m’a passionnée. Je dois d’ailleurs à mon terrain professionnel, éminemment conflictuel, une part de mon inspiration.

Et voilà que je rédige la première signature du jour sur la page de titre de Diabolo pacte. Je tends à ma camarade de classe le livre avec sa dédicace personnalisée en remarquant :

Même si c’était le seul de la journée, elle serait quand même réussie.

La vie a en effet plus d’une synchronicité dans son sac à malices, autrement dit des coïncidences qui font sens.

Rassurez-vous, j’ai signé d’autres livres, et pas seulement Diabolo pacte.

Pour finir, la photo de classe : Anne est sur la 3ème rangée, la 2ème (sans lunettes) en partant de la droite. Où suis-je ? À vous de deviner.

Lycée Saint-Sernin (Toulouse) année 1971-72


2022 :mon futur était en marche

Puisque nous sommes dans les prix, continuons sur la lancée avec le recueil 3 fois primé, Mon opium est dans mon cœur ( https://claudine-can...