Ce que j'écris, pourquoi, pour qui et les surprises de mon parcours littéraire

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mercredi 24 avril 2024

L’écriture, un effeuillage mental ?

Drôle d’émotion qui m’étreint à la veille de la parution du recueil de mes poèmes de jeunesse, Mon opium est dans mon cœur. Pour une fois, je parle de moi, et pas entre les lignes comme on peut imaginer que ça peut se passer dans mes romans, mais en vers souvent écrits à la première personne. Voilà qui met en jeu un sentiment quelque peu dérangeant : la pudeur.

Longtemps, je me suis refusé à parler de moi : le sujet ne m’intéressait pas. Je préférais en rire derrière les facéties d’une Josette Gougeard ou d’un Garin Bressol. Diabolo pacte : un traitement de cheval contre mes insuccès éditoriaux et qui m’ouvrit la porte de l’édition.

Puis, tout en me démenant pour me faire publier, j’écrivais des nouvelles, bêtes à concours censées m’ouvrir des portes. Si aucune, parmi celles que je lançai dans la course, ne fut primée, leur recueil est paru aux éditions Auzas.

Parmi ces dix histoires, toutes inspirées du réel, il en est deux purement autobiographiques. La première, Vue courte et pattes d’eph, remonte au temps d’avant mes velléités de publications. Le genre romanesque demeurait encore à mes yeux une épreuve insurmontable. Autant dire que ce récit est un acte purement gratuit, destiné à ne pas être lu. J’y confie mes désarrois de binoclarde à laquelle le port de prothèses oculaires infligea une blessure narcissique déterminante. Au moment où je l’écrivais, les lunettes étaient encore loin de se métamorphoser en accessoire de mode. On ignorait encore que les générations suivantes produiraient de plus en plus de miros. J’ai dû en transformer l’entame afin de l’adapter à l’actualité.

La deuxième, Le bonnet d’Anne d’Agnès B., est directement inspirée de mon vécu. En qualité de témoin quand le père Montariol, notre professeur principal de français-latin, inflige une gifle magistrale à deux garçons surpris à se battre, perchés sur les tables, à coups de tendeurs à vélos.

En qualité d’héroïne principale quand Agnès B. raconte son année de cours élémentaire 2ème année tout au long de laquelle elle subit l’acharnement d’une institutrice, madame P., dont elle devint très vite la tête de turc. Le terme juridique n’avait pas encore été inventé. Aujourd’hui on parlerait de harcèlement. Je retranscris à la troisième personne le déroulement et les détails de mon calvaire quotidien, propos humiliants, coup de règle sur la joue etc., peur au ventre, sentiment d’impuissance, mais aussi la rage de résister au point de remporter une victoire éclatante.

Bien plus tard quand, dans ma vie professionnelle, je me suis trouvée en butte à un harcèlement horizontal, je me suis souvenue de madame P., et j’ai réglé le problème en deux coups de cuillère à pot.

Aujourd’hui, hélas, le harcèlement scolaire est devenu fait de société et conduit de trop nombreuses victimes au suicide. J’en suis glacée d’horreur car, à l’époque, en dépit de mon désarroi et de ma terreur de devoir retourner à l’école, pas une fois l’idée ne m’a traversé l’esprit de me réfugier dans la mort. Les enfants de ma génération étaient peut-être moins au fait que ceux d’aujourd’hui. Le jeudi, le dimanche et les vacances constituaient de véritables coupures nous mettant à l’abri de nos harceleurs. Nous vivions sans téléphone portable, sans téléphone tout cours, hors de réseaux virtuels débouchant sur de véritables crimes, les pieds scotchés aux patins à roulettes ou le front penché sur nos premiers livres, rêvant aux héros des littératures jeunesse d’alors.

Aujourd’hui où les professeurs des écoles se prennent des baffes pour avoir osé ne serait-ce qu’une remontrance, une madame P. serait virée avec perte et fracas de l’Éducation nationale. Ma mère s’était déplacée pour essayer de régler la question à l’amiable.

Je vais mettre des gants, dit-elle à mon père.

Je m’interrogeais sur la couleur des gants. Maman n’avait pas dû enfiler la bonne paire parce que rien ne changea et que l’affaire en resta là. J’étais condamnée à m’écraser ou à me défendre. Seule.

Allez ! J’en deviendrais nostalgique au point de souhaiter me retrouver face à une madame P., pourvu que papa et maman soient là pour me réconforter après l’école.



jeudi 28 décembre 2023

Dernier article de 2023 : je fais le bilan de l’année.

2022 s’est achevée sur une mauvaise nouvelle, la disparition de RroyzZ éditions qui avait publié les deux premiers volets de ma saga de science-fiction, Poussière de sable, et deux excellentes, la future publication d’un recueil de nouvelles aux éditions Auzas, Coup de grain, et la réédition de mon premier roman, Diabolo pacte, aux éditions d’Avallon.

En novembre 2022, alors que j’ignorais que mon éditeur mettrait la clé sous la porte, je présente Poussière de sable, légendes ourdiniennes, au concours des Arts Littéraires de Saint-Orens. En mars, je n’ai plus d’éditeur, mais obtient la mention spéciale du jury. J’en suis fière et très heureuse pour la science-fiction dont on se méfie trop alors qu’elle parle on ne peut mieux de nos sociétés humaines.

Lors de la remise du prix, je retrouve une amie que je n’avais pas revue depuis une éternité : camarade de fac avec qui j’ai partagé un appartement à Vienne. Cathy ne devait pas y être mais, au dernier moment, une activité s’étant décommandée, elle a décidé de faire les 50 km séparant sa résidence de Saint-Orens. Synchronicité jungienne ?

Fin mai, Coup de grain et Diabolo pacte sortent des presses. Le travail éditorial effectué par les deux éditeurs est on ne peut plus sérieux. Si sérieux que je sortais des séances de relecture avec un mal de tête… inédit. La facture des deux produits est parfaite du point de vue de la mise en page et de la couverture. Bien que ma table de dédicace présente deux beaux livres, attrayants en diable, mes deux premières séances sont catastrophiques et j’en ressors absolument découragée, avec l’idée que, désormais, je n’écrirais plus pour être publiée, mais pour mon propre plaisir. Je termine toutefois les deux derniers volets de ma tétralogie de science-fiction. Mon bêta-lecteur de SF doit se remettre au turbin. J’attends encore.

Je décide donc de n’écrire que pour mon plaisir et, comme je l’avais fait en 2005 avec Diabolo pacte, je change mon fusil d’épaule et opte pour un genre différent. Je n’en dis pas plus.

Découragée, je me cache mais, auparavant, la librairie Privat (Toulouse) a programmé une dédicace pour le 23 septembre. Sur la table, j’abats mes cartes : mes nouveautés, Coup de grain et Diabolo pacte, mais aussi mon 2ème roman, Elwig de l’Auberge Froide, paru en 2014 et toujours distribué. La journée sera un franc succès qui me remettra le pied à l’étrier. Alors que pendant des années je me suis déplacée pour des clopinettes, je suis contente d’avoir quelqu’un qui désormais m’attend devant la table.

Tout en continuant les salons et les dédicaces en librairie, je présente mes nouveautés au concours de l’Académie des Livres de Toulouse. J’obtiens le 2ème prix de la nouvelle pour Coup de grain et le premier prix du roman pour Diabolo pacte. La cérémonie à lieu le 8 décembre à la Médiathèque José Cabanis. L’année finit donc on ne peut mieux.

Quelles résolutions pour 2024 ? Poursuivre les salons et les dédicaces. Un de mes souhaits : des lecteurs, des lecteurs, des lectrices, mais pas ces horribles lecteur.ice.s. Et qui vivra, verra.



mercredi 20 décembre 2023

Podium

Pour une fois, collons à l’actualité comme le maillot cycliste colle au corps.

L’évènement de ces derniers jours, c’est la remise des prix de l’Académie des Livres de Toulouse dans l’auditorium de la Médiathèque José Cabanis. Calqué sur les jeux olympiques, elle désignera, dans chaque catégorie, 3 auteurs honorés d’un podium à 3 marches.

Cette année, je concourais avec Coup de grain, recueil de nouvelles, et Diabolo pacte, mon premier roman ressuscité en 2023 dans une nouvelle peau et chez un nouvel éditeur, Avallon & Combe.

Dès mon arrivée à la Médiathèque, je suis abordée par des amis cyclotouristes pour une dédicace des deux livres en lice. C’est tout nouveau pour moi. Longtemps je me suis déplacée en salon et en librairie pour des clopinettes. Or, depuis quelque temps, je n’ai pas le temps de m’installer que j’ai quelqu’un devant la table. Dans l’auditorium, point de table : qu’à cela ne tienne, je dédicace sur mes deux genoux.

La cérémonie débute avec la remise du prix de poésie où j’ai fait partie du jury. Je communiquerai à ce sujet sur les réseaux. Puis vient le prix de la nouvelle : je monte au figuré sur la 2ème marche, fière d’être la dauphine de Betty Marescaux Tyteca pour « Bonnes nouvelles ? » publiée comme moi par les éditions Auzas.

La cérémonie se poursuit, le prix du roman suivi de la désignation de la Plume d’or distinguant un auteur prolifique. Un demi-mystère, car si on m’a laissé entrevoir un podium, j’ignore sur quelle marche le jury m’aura placée. Troisième, ni mon nom ni mon titre ne sont cités. Deuxième, non plus. Le doute n’est plus permis : Diabolo pacte est paré d’or. Une divine surprise !

Une lectrice du jury monte sur l’estrade et fait l’éloge du roman et de la romancière. Émue et honorée. J’ai préparé une allocution. Le public rit. N’ayant pas préparé d’extrait à lire, j’improvise et prie le représentant du maire, conseiller municipal chargé de la lecture publique, de me donner 2 chiffres, l’un pour le numéro de page, l’autre pour la ligne, et je lis le passage où on apprend que Josette Gougeard s’est retrouvée veuve à 35 ans. Pour un roman rigolo, ça tombe mal. La remarque fait marrer la salle. Et je suis aux anges, si j’ose dire.

Avec Samir Hajije, conseiller municipal en charge de la lecture publique


mardi 5 décembre 2023

Longue attente et textes courts

Le dlog, insatiable, réclame son os à ronger, et je dois me servir dans mon garde-manger, par définition limité : l’inflation, la hausse des impôts, etc. Donc, ouvrant la grille qui laisse passer l’air, je tombe direct sur la case : 10 friandises pour l’entracte. C’est sur l’affiche concoctée par mes soins – je devrais dire bricolée - pour attirer le chaland vers le recueil de mes 10 nouvelles, Coup de grain. D’ailleurs, il arrive que le chaland se marre.

Depuis sa parution, j’ai pu constater que la nouvelle suscitait moins d’enthousiasme que le roman et que le lecteur préférait se délester de 20 pour une fiction en enfer (Diabolo pacte) et même de 22 en échange d’un thriller franco-allemand (Elwig de l’Auberge Froide).

Je préfère une histoire entière, m’a confié une lectrice avant de se faire dédicacer Diabolo et Elwig (les romans aussi ont leurs petits noms).

Voilà qui est rassurant à une époque où le livre est un moindre objet de désir, comparé à un smartphone, à un tatouage ou à un abonnement à Netflix.

Or, cette désaffection pour la nouvelle est un phénomène franco-français. Les anglo-saxons, les Tchèques et autres Européens de l’Est se délectent d’en lire.

Si le genre est prisé en Allemagne, c’est aussi que la nécessité fit loi après la guerre. La pénurie de papier exigeait du court. Or ce n’est pas parce que le texte est court, que les idées le sont aussi et que l’intrigue est moins captivante. Une histoire courte doit vous saisir dès la première phrase et ne pas vous lâcher avant le mot FIN.

Un confrère, qui écrit aussi des nouvelles, argumente derrière sa table de dédicace avec un argument censé abattre les dernières résistances : Si vous avez peu de temps pour lire, la nouvelle est le genre idéal. Par exemple dans la salle d’attente d’un médecin…

Cela dépend du médecin. La réputation de mon généraliste est si répandue et avérée que j’emporte des trilogies, voire des tétralogies, pour tromper l’attente.



jeudi 7 septembre 2023

Laisser une trace

Pas fan des titres à l’infinitif, du moins pour mes propres livres, je me laisse aller à la mode. Car c’est bien le sujet de mon article. Comment m’est-il venu à l’esprit, au point de partager mes émotions avec les lecteurs de ce blog ? Sûrement la conjonction de deux remarques murmurées à mon oreille par deux personnes qui ne se connaissent pas et de générations et de milieux socio-professionnels différents.

Un ami auteur, appelons-le Patrick, c’est son vrai prénom, me confie :

J’écris, notamment, pour laisser une trace.

Peu de temps après, ma jeune protégée, appelons-la Sabrina, c’est son vrai prénom, s’esbaudit sur mes livres :

Toi, au moins, tu laisseras une trace. Qui se souviendra de Sabrina L, manip radio ?

De leur vivant, les patients auxquels la manip radio découvre une tumeur douteuse à l’IRM ou au scanner, annoncée par la suite par le radiologue, n’oublieront jamais le visage de la manip ayant procédé à l’examen.

Ce que Patrick et Sabrina évoquaient, c’est l’éventuelle trace laissée après la mort. J’avoue que je n’écris pas pour ça, même si, attirée par le passé et les archives depuis l’enfance, la question du souvenir, de la trace, me travaille.

 Écrivain (j’ai l’audace et l’orgueil de m’emparer d’un si beau titre), je détiens le pouvoir de faire de la vie de défunts de ma lignée (ou pas) des romans qui, éventuellement publiés, laisseront une trace.

Trace déposée à la Bibliothèque Nationale et à la Bibliothèque du Patrimoine de Toulouse. Peut-être qu’un petit curieux ou une fouineuse professionnelle aura l’idée d’exhumer mes Diabolo pacte, Elwig de l’Auberge Froide, Poussière de sable et autre Coup de grain.

À propos de Coup de grain, je pense à une histoire intitulée Alexander the Great. Non, je ne vous emmène ni en Perse ni en Macédoine. Je ne vous mène même pas en bateau. Vous montez dans un Boeing 747 sans gaspiller un centilitre de kérosène. Une histoire d’accident, que j’ai largement romancée, inspiré d’un fait divers entendu il y a 30 ans à la radio : un avion se crashe dans le Potomac, les survivants sont hélitreuillés et un homme cède sa place à maintes reprises jusqu’à ce qu’il se noie. Je tenais absolument à rendre hommage à cet anonyme, à faire en sorte que son acte d’héroïsme ne sombre pas dans l’oubli. Mais cela dépend de vous, chers lecteurs.

Quant à moi, laisser une trace après ma mort, j’avoue que je m’en tape. Ce n’est pas pour ça que j’écris. J’écris parce que j’aime ça et que je suis addict. La trace, c’est de mon vivant, que je désire par-dessus tout la laisser. Et tout le reste est littérature.

Et avec son marque-page !


L’écriture, un effeuillage mental ?

Drôle d’émotion qui m’étreint à la veille de la parution du recueil de mes poèmes de jeunesse, Mon opium est dans mon cœur. Pour une fois, j...