Ce que j'écris, pourquoi, pour qui et les surprises de mon parcours littéraire

jeudi 24 mars 2022

Diabolo pacte, premier roman ? Pas si simple

Mon premier (roman publié) est mon deuxième (roman écrit). Ma carrière (dur, dur, je casse des cailloux pour voir un petit bout de ciel) ressemble à une charade, à un puzzle dont il faut remettre les pièces en ordre. Donc revenons à la fin du premier épisode : Poussière de sable, un monument de science-fiction en 5 parties valant son poids de papier, prend son envol via la poste vers les éditeurs : non, c’est non, voilà ce que je reçois en retour. Je suis blessée sous la mitraille mais, sous le dolman trempé d’encre sanglante, la hussarde des Lettres palpite encore, se lève et s’écrie parmi les fins de non-recevoir (on a le pont d’Arcole qu’on peut) : Non, non, non, la bataille est perdue mais pas la guerre, je change mon fusil d’épaule et l’arme de munitions irrésistibles.

En effet, je vais leur donner du commercial, une idée si simple que personne n’y aura pensé : un éditeur fait le pari de publier le premier inconnu venu qui accepte de vendre son âme au diable et c’est l’imbittable Josette Gougeard qui signe.

Nous sommes en août 2005. Je raconte l’histoire à un ami : il se marre. Et j’écris, j’écris un livre sur les livres, sur les écrivains, sur l’ambition, sur la société, sublimant mon échec au travers de Josette Gougeard et d’Antoine Maurier, un auteur de SF qui accède au succès. Je l’intitule Diabolo pacte et le place sous le signe de la lame XV du tarot divinatoire, le Diable. Personne ne sait que j’écris, à part mes parents, Jean-Paul, mon équipier cyclotouriste, et Éric, mon bêta-lecteur de SF. Je mets un point final que j’ignore provisoire et suis les conseils selon lesquels il serait indispensable de se faire des relations avant de se lancer dans la phase commerciale. Un soir de décembre, je me rends à la remise d’un prix littéraire dans les locaux de ce qui est encore la CRAM de Midi-Pyrénées en attendant la CARSAT. Quant à l’Occitanie, le nom est alors enveloppé de brumes cathares épargnées des spots de la  technocratie bruxelloise des grandes régions. Donc, je mets les pieds dans ce qui n’est pas encore la CARSAT. En toute innocence. L’écrivain primé m’y attend. Il s’appelle Jean-Claude Ponçon et sera mon parrain littéraire. Je vous le présenterai vendredi prochain.

Tarot divinatoire



vendredi 18 mars 2022

Nathalie, une rencontre, imagesderomans

Quand le livre paraît, son auteur fait un vœu, toujours le même : pourvu qu’il trouve un public ! Laissons de côté l’épineuse question de sa diffusion et de sa prescription par les libraires. La seule certitude de l’écrivain est minimale : ce livre qui vient au monde a certes plu à son éditeur, élargi éventuellement à un comité de lecture, MAIS l’auteur attend avec anxiété les premières critiques. Je ne fais pas exception : quand j’ai un livre qui sort je rentre dans les affres. C’est dire que j’accueille avec une explosion de joie le premier avis positif paru dans la presse ou/et posté sur la toile.

Nathalie Glévarec qui tient un blog original qui allie son amour du roman et la découverte de nouveaux auteurs à son talent de graphiste ( https://imagesderomans.blogspot.com/). Pour chacun des romans chroniqués Nathalie recrée la première de couverture selon ses impressions de lecture.

J’ai connu Nathalie au cours du salon du livre d’Auch (en plein Gers). Je lui ai offert un exemplaire de mon 2ème roman, Elwig de l’Auberge Froide. Toujours avec l’interrogation : va-t-il lui plaire ? Le retour de Nathalie fut si enthousiaste qu’elle s’est empressée d’acquérir Poussière de sable, L’épopée euskalienne à sa parution. Et son retour de lecture m’a encouragée à poursuivre l’aventure et à ouvrir le volet 2 : Légendes ourdinienne.

https://imagesderomans.blogspot.com/2018/01/elwig-de-lauberge-froide.html

https://imagesderomans.blogspot.com/2019/08/poussiere-de-sable-lepopee-euskalienne.html

Nathalie Glévarec
Nathalie Glévarec


jeudi 10 mars 2022

Poussière de sable, Légendes oudiniennes : L'entame de la 1ère partie

 

PREMIÈRE PARTIE - ARCHIPELAGUS

 Le dispensaire sur pilotis jouxtait le vivier des trimeurs. On y accédait par une échelle mobile depuis qu’une panne immobilisait l’ascenseur hydraulique. Désormais, les malades et les blessés étaient tractés au sec à l’aide d’un palan actionné par des convalescents. Quant au médicus, il grimpait les échelons avec, sur les épaules, quelque enfant victime d’accident, certes en âge de trimer mais encore si léger qu’Atanis Bartolomius, le sapiens médicus, pouvait en supporter le poids.

La première fois qu’il avait posé le pied sur le sol en béton, Bartolomius s’était indigné que son prédécesseur pût s’accommoder du chaos. Des blessés étaient contraints de presser leur membre brisé contre le corps de malades contagieux. Bartolomius fit scinder les espaces du plateau en fonction des pathologies et ordonna de couvrir le sol d’un tapis en peaux de dauphin. Il s’attira immédiatement l’indignation de F Ariana, la fonctionnaire chargée du vivier T de l’Urbs. T comme trimeurs :

— Sauf votre respect, Sapiens Médicus, il n’est pas prévu de gaspiller un matériel aussi noble pour le confort des trimeurs. Une simple couche d’hydraplast aurait largement suffi.

Ce matériel de synthèse, les trimeurs le fabriquaient au pied des pétrogeysers cernés de plateformes d’où surgissaient des chaînes de cuves et de laminoirs. Bartolomius leur devait un contingent de brûlés plus ou moins graves qu’il s’acharnait à sauver. En vain car, dès qu’il avait le dos tourné, les plus atteints étaient jetés en pâture aux requins.

Pour le choix du sol, Bartolomius ne céda pas et les peaux de dauphin vinrent adoucir le béton. Un S n’était pas censé obéir à un F, de la même manière que les T devaient soumission aux F et aux S. Par contre, un F quelconque pouvait aviser les hautes instances et placer un S déviant en mauvaise posture.

Ariana, la F qui s’était indignée au sujet du tapis précieux, s’en était toujours abstenue, sachant à qui elle avait affaire. Sapiens Bartolomius traînait après lui une réputation de déviant mais, issu de la puissante lignée des Atanides, s’il était mal considéré, il était aussi protégé. Ce que la F allait très vite constater, c’est qu’on pouvait être un médicus efficace tout en transgressant l’ordre établi, à l’exact opposé du dernier médicus qui se contentait de compter les morts. En secret, elle admirait la façon dont Atanis Bartolomius rendait la santé aux trimeurs.

Il ne se satisfaisait pas de poser attelles et cataplasmes. Il irradiait d’ondes ultrasoniques les os fracturés afin de hâter la reconstitution des cellules et la consolidation des organes malades. Ce traitement de pointe était réservé aux élites peu enclines à rétablir la santé d’un stock renouvelé par le biais des nombreuses naissances.

Quantité négligeable mais indispensable, sans laquelle les lignées de sapiens et de sapiencia ne pourraient se livrer corps et âme à leur unique raison d’être au monde : la science.

Archipelagus constituait en effet un milieu naturel invivable même si l’espèce s’était adaptée sans atteindre toutefois le niveau d’évolution des mammifères marins. Chaque surface sèche demeurée émergée était une victoire sur l’océan. Les îles étroites de l’archipel austral ne donnaient que de rares palmiers aux troncs gigantesques plongeant leurs racines dans un sol parcimonieux où le sable l’emportait sur la terre. Il avait fallu sans trêve étendre les polders pour arracher à l’eau salée des lieux de vie où respirer, s’alimenter, dormir, se reproduire et étudier au sec. Les trimeurs s’attelaient à la poldérisation avec une fatalité d’esclave. Plongeant pour extraire du fond de l’océan le sable que d’autres trimeurs transformaient en hydraplast ou en terre artificielle. Se tuant littéralement à la tâche. Y perdant la santé. La plupart du temps trop abrutis et harassés pour se révolter.



jeudi 3 mars 2022

Mon père, ce héros… qui m’a appris à mentir

 Si ma mère me tenait grand ouvertes les portes de l’étrange et de l’invisible, mon père quant à lui se gaussait littéralement de l’ésotérisme. Il disait de sa belle-mère que si elle avait vécu 5 siècles auparavant elle aurait fini sur le bûcher comme sorcière. Ce qui est paradoxal c’est qu’en tant que sculpteur-peintre, il produisait des œuvres s’apparentant au réalisme fantastique. J’ai d’ailleurs adressé aux éditeurs des manuscrits avec, pour illustration, l’une de ses tableaux.

Un seul coup d’œil suffit pour saisir ce que mon père m’a apporté. Je pense que j’écris comme il peignait : en enrobant de fantastique les contours du réel, si ce n’est que je puise dans les mots les couleurs et les formes qui façonnent mes mondes imaginaires.

Papa m’a donné un seul conseil pour les rédactions hebdomadaires qu’on commandait aux écoliers sur des sujets du style narrer une journée de vacances, une dispute, etc.  Il me martelait : il faut mentir, ce qui voulait dire qu’il fallait éviter de raconter sa vie, mais tout inventer.

Je me suis mise à habiter des villas et des châteaux alors que nous logions dans un clapier, à avoir des loisirs que mes parents n’auraient jamais pu m’offrir, comme l’équitation et la plongée sous-marine. Mon père jubilait de voir ses conseils approuvés par les bulletins scolaires. Il faut mentir, mentir, répétait-il.

En tant que romancière, je pense avoir largement dépassé ses espérances.

Manuel Candat

Manuel Candat, Sortilèges, 1979

 

L’écriture, un effeuillage mental ?

Drôle d’émotion qui m’étreint à la veille de la parution du recueil de mes poèmes de jeunesse, Mon opium est dans mon cœur. Pour une fois, j...