Ce que j'écris, pourquoi, pour qui et les surprises de mon parcours littéraire

Affichage des articles dont le libellé est narration. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est narration. Afficher tous les articles

lundi 26 septembre 2022

Écouter avant d’écrire

L’art du roman, c’est celui de raconter des histoires et de donner une âme à des personnages, au point qu’ils prennent vie dans l’imagination des lecteurs. Au bout de quelques lignes, les marionnettes que l’auteur agite coupent le cordon ombilical qui les relie à l’auteur. Dans l’immense cohorte des personnages de romans, de rares élus accèdent au statut d’archétype : Emma, Sherlock, Rastignac et les autres.

Mais je ne suis pas venue ici pour enfoncer des portes ouvertes. Je ménage mon épaule, à défaut de mes méninges.

Donc, j’écris des romans parce que j’aime raconter des histoires que, le plus souvent, j’invente. En effet, il y a peu de chances que je sois tombée sur une abominable pieuvre des sables ou un euskalien de plumes et de lumière.

Je prends toutefois le risque de me démettre l’autre épaule : si on aime raconter des histoires, c’est qu’on aime en écouter. De la même manière qu’un écrivain a été et est un lecteur boulimique.

Donc l’époque où j’aimais entendre des histoires remonte à très loin, en ces temps de l’enfance sans smartphone et sans télé ou du moins l’éteignait-on quand un visiteur était là. Les enfants ne monopolisaient pas les conversations, réduits à écouter les adultes ou à jouer sous la table. La réduction m’allait très bien car j’étais toute ouïe dès que les grandes personnes racontaient leurs histoires.

L’un des frères de ma mère déboulait souvent en pleine nuit d’on ne savait d’où en apportant une bourriche d’huîtres. Un type de sac et de corde, disait mon père. Toutefois doublé d’un bourreau des cœurs qui allait de ville en ville.

La meilleure fut le non-mariage de mon parrain, frère aussi de ma mère qui racontait que, petit, il cassait tous les jouets pour voir ce qu’il y avait dedans. N’ayant pas le certificat d’études, il fut refoulé d’une école technique et eut une vocation que son physique et sa souplesse lui permirent de réaliser: la danse qu’il apprenait à Paris. Mais c’est à Toulouse qu’il s’enticha d’une femme qui le rendait malheureux. Si accro qu’il voulut l’épouser mais ses copains veillaient qui le jetèrent, fin saoul, dans le train de nuit pour Paris. Je vous laisse imaginer la tête des familles et des invités devant la mairie. Comme me l’a dit un jour son jeune frère :

On voit ça dans les films mais chez nous ça arrive.

Je suis sûre que vous aussi vous en avez de belles à raconter.

Suite et fin de l’histoire : une carrière de danseur, c’est court. Mon parrain finit par se marier à Montréal. Il changea de métier. Là-bas, on ne lui demanda pas s’il avait des diplômes. Il leur suffit de constater qu’il maîtrisait l’électricité et l’électronique sans avoir jamais appris.

Quant à ma marraine, elle savait réparer les bagnoles. Comme quoi, ni l’un ni l’autre ne m’ont soufflé dessus.

J’aimais aussi entendre les discussions entre Maman et la seule copine qu’elle eût dans sa vie adulte. Deux formules qui me mettaient particulièrement en joie :

On est marron.

J’en ai un plein chapeau.

Parfois, je laisse traîner dans mes dialogues des expressions glanées ici ou là.

J’aimais écouter, j’ai écouté mais il y a une chose que je regrette, c’est de pas avoir posé de questions. Parce que je n’y ai pas pensé, parce que j’étais adolescente et tourmentée par d’autres questions. À présent que plus personne n’est là pour me répondre je n’ai d’autre issue que d’imaginer, romancer…

Mon parrain avec ma mère, Marraine et filleule


Du coq à l’âne

Tel est le destin de ce blog d’être alimenté pour ne pas mourir d’inanition. Qui plus est, pas avec n’importe quoi, sous peine d’être frappé...