Ce que j'écris, pourquoi, pour qui et les surprises de mon parcours littéraire

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lundi 26 février 2024

Métier : fictionnaire

Depuis la vogue de féminisation à tout crin de noms qui s’utilisait jusqu’à présent au masculin, je me marre. J’ai découvert les pompières, les contrôleuses… les écrivaines et les autrices. Disons que nous avons été sommées de nous désigner comme telles et que nous nous sommes exécutées… comme un seul homme. Il fallait que j’ose ! Ce qui m’a rebutée, ce n’est pas tant la féminisation, parfaitement correcte sur le modèle de acteur-actrice, que l’obéissance immédiate et majoritaire à l’injonction.

J’ai donc pris un moyen terme et me suis amusée à me qualifier de locomautrice, locomotive folle qui fait dérailler le lecteur par-dessus les parapets de la sagesse et de la Raison.

Un peu longuet, non ? M’est venu un autre terme pour qualifier mon activité. Puisque j’écris, dans mes romans et nouvelles, des histoires, bref de la fiction, ne serait-il pas idoine de me présenter comme fictionnaire ?

Encore un néologisme. Dans le dictionnaire vous ne trouverez que factionnaire et fonctionnaire.

Factionnaire, le fictionnaire l’est quand l’envie le pique d’être publié et qu’il frappe aux portes des maisons d’édition. Avant, il se prenait des portes sur le nez. Maintenant, il encaisse des messages de refus – dans le meilleur des cas – ou le silence total. Donc notre fictionnaire doit se transformer en enquêteur afin de dénicher la maison adéquate, celle qui ne le chassera pas à coups de pied comme un vulgaire corniaud, et en styliste en l’art de présenter sa prose et sa personne.

Et fonctionnaire ? Peu flatteur me direz-vous si on considère, selon de petits farceurs, que la fonction publique serait l’endroit où ceux qui arrivent en retard croisent ceux qui partent en avance. C’est rigolo, mais gageons que la suppression de nombreux emplois qui rendaient des services gratuits à ceux qui n’avaient pas les moyens de se payer un avocat fiscaliste ou spécialisé (en droit du travail, de la consommation, etc.) – sans parler de l’École et des hôpitaux publics, se marrent moins en trouvant porte de bois.

Donc, quand je rentre et sors de mon bureau, je me croise moi-même, en survêt confortable ou robe de chambre pour m’asseoir derrière le clavier, en cuissard cycliste ou tenue plus chicosse pour exhiber sur une table mes livres en tenue de soirée afin d’aguicher le potentiel lecteur ou la lectrice curieuse.

Parfois, je ne me reconnais pas, et il m’arrive de flanquer des coups de casque à ma crinière que je refuse d’émonder. Elle amortit les coups, et le Diable sait si j’en ai reçus dans ce putain de milieu !




jeudi 5 janvier 2023

Comment je ne suis pas devenue autrice

Donnons au blog son os à ronger. Peut-être y trouvera-t-il sa substantifique moelle, avant d’aborder les deux évènements marquants de ma vie littéraire de ce début d’année : la réédition de Diabolo pacte (article rédigé alors que je ne connaissais pas les éditions d'Avallon) et la parution de Vue courte et pattes d’eph.

Depuis que le mot est entré en scène par le biais de la féminisation à tout crin des substantifs pour faire inclusif, je tourne autour du pot, telle une poule rechignant à plonger dans la marmite. Bref, au lieu de dire que je suis autrice, je réponds romancière, n’osant m’attribuer ce merveilleux nom d’écrivain que je n’oserais affubler d’un e à même de lui faire perdre sa charge magique.

Quelques années auparavant je m’étais exprimée sur la question dans Diabolo pacte, roman qui tourne autour des livres et du monde de l’édition. Je vous offre aimablement quelques extraits :

Le troisième auteur était une auteure. C’est ainsi qu’elle se présenta au grand dam du prof de français qui sommeillait en Bressol et qui penchait plutôt pour la règle commune : emmerdeur, emmerdeuse, auteur, auteuse. Toujours est-il que, eure ou euse, celle-ci brûlait de l’ambition de devenir écrivaine mais en dix pages Bressol eut largement le temps de se persuader que de ce point de vue-là elle était grillée, et même calcinée.

Donc, du jour au lendemain, j’ai appris que j’étais autrice, du moins que c’est ainsi que je devais me nommer auprès de mes consœurs et confrères, lectrices et lecteurs et même auprès du concierge et du facteur venant me présenter le calendrier de la poste, tradition à laquelle je ne faillis jamais, étant moi-même la fille du facteur.

Et tout de suite, j’ai dit non, je ne dirai pas ce qu’on a décrété que je devais dire.

J’ai coupé la poire en deux, plaisantant que je préférais qu’on me prît pour une locomautrice, cette folle du logis, l’imagination, entraînant le lecteur (et la lectrice) dans des lieux où il n’aurait jamais mis les pieds sans le souffle de ma plume.

Dernièrement, j’étais derrière ma table de dédicace, en plein froid d’un marché de Noël, quand un jeune couple s’est penché sur mes romans, notamment ma saga de SF, Poussière de sable. Et voilà que j’entends : Vous êtes une autrice…Je ne me souviens plus de la suite. Et je me suis posée la question :

Pourquoi ce p… de mot te dérange tant ? Tout le monde l’emploie maintenant.

Je me suis dit, il est dans la lignée de acteur actrice, amateur amatrice. Et puis j’ai trouvé. J’ai mis le doigt où ça me faisait mal. Ce qui m’a choqué, c’est la célérité des gens (qu’ils écrivent ou qu’ils lisent) à adopter le comportement qu’on attend d’eux.

Ces trois dernières années m’ont conforté, hélas, dans mon malaise. La majorité s’est conformée à des inj.on.e.c.tions paradoxales. Et la dernière :

Baissez le chauffage, éteignez la lumière, décalez la lessive. Replongez dans le précédent article et vous saurez ce que j’en pense.

Vaut-il la peine de monter sur ses ergots pour si peu ? Mais c’est peu à peu que le conformisme gagne. Petit bout par petit bout qu’est rogné le territoire de la libre expression avec l’éviction de termes non conformes à la doxa.

Je suis une romancière transgenre qui se balade de la SF au roman contemporain, je n’écris pas au féminin, je suis une femme née au XXème siècle qui écrit avec ses tripes, son cœur et son cerveau (dans le désordre) et ce qui me gêne, quand j’écris, ce n’est pas le teur ou le trice, c’est de devoir quitter le clavier pour m’atteler à la tambouille ou prendre le plumeau pour ne pas disparaître sous la poussière qui, chez moi, n’est pas toujours de sable.



Le réel, y a que ça de vrai !

Fictionnaire de l’écriture, j’ai débuté par des histoires absurdes que presque personne n’a lues pour la simple raison qu’elles sont demeuré...