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jeudi 10 mars 2022

Poussière de sable, Légendes oudiniennes : L'entame de la 1ère partie

 

PREMIÈRE PARTIE - ARCHIPELAGUS

 Le dispensaire sur pilotis jouxtait le vivier des trimeurs. On y accédait par une échelle mobile depuis qu’une panne immobilisait l’ascenseur hydraulique. Désormais, les malades et les blessés étaient tractés au sec à l’aide d’un palan actionné par des convalescents. Quant au médicus, il grimpait les échelons avec, sur les épaules, quelque enfant victime d’accident, certes en âge de trimer mais encore si léger qu’Atanis Bartolomius, le sapiens médicus, pouvait en supporter le poids.

La première fois qu’il avait posé le pied sur le sol en béton, Bartolomius s’était indigné que son prédécesseur pût s’accommoder du chaos. Des blessés étaient contraints de presser leur membre brisé contre le corps de malades contagieux. Bartolomius fit scinder les espaces du plateau en fonction des pathologies et ordonna de couvrir le sol d’un tapis en peaux de dauphin. Il s’attira immédiatement l’indignation de F Ariana, la fonctionnaire chargée du vivier T de l’Urbs. T comme trimeurs :

— Sauf votre respect, Sapiens Médicus, il n’est pas prévu de gaspiller un matériel aussi noble pour le confort des trimeurs. Une simple couche d’hydraplast aurait largement suffi.

Ce matériel de synthèse, les trimeurs le fabriquaient au pied des pétrogeysers cernés de plateformes d’où surgissaient des chaînes de cuves et de laminoirs. Bartolomius leur devait un contingent de brûlés plus ou moins graves qu’il s’acharnait à sauver. En vain car, dès qu’il avait le dos tourné, les plus atteints étaient jetés en pâture aux requins.

Pour le choix du sol, Bartolomius ne céda pas et les peaux de dauphin vinrent adoucir le béton. Un S n’était pas censé obéir à un F, de la même manière que les T devaient soumission aux F et aux S. Par contre, un F quelconque pouvait aviser les hautes instances et placer un S déviant en mauvaise posture.

Ariana, la F qui s’était indignée au sujet du tapis précieux, s’en était toujours abstenue, sachant à qui elle avait affaire. Sapiens Bartolomius traînait après lui une réputation de déviant mais, issu de la puissante lignée des Atanides, s’il était mal considéré, il était aussi protégé. Ce que la F allait très vite constater, c’est qu’on pouvait être un médicus efficace tout en transgressant l’ordre établi, à l’exact opposé du dernier médicus qui se contentait de compter les morts. En secret, elle admirait la façon dont Atanis Bartolomius rendait la santé aux trimeurs.

Il ne se satisfaisait pas de poser attelles et cataplasmes. Il irradiait d’ondes ultrasoniques les os fracturés afin de hâter la reconstitution des cellules et la consolidation des organes malades. Ce traitement de pointe était réservé aux élites peu enclines à rétablir la santé d’un stock renouvelé par le biais des nombreuses naissances.

Quantité négligeable mais indispensable, sans laquelle les lignées de sapiens et de sapiencia ne pourraient se livrer corps et âme à leur unique raison d’être au monde : la science.

Archipelagus constituait en effet un milieu naturel invivable même si l’espèce s’était adaptée sans atteindre toutefois le niveau d’évolution des mammifères marins. Chaque surface sèche demeurée émergée était une victoire sur l’océan. Les îles étroites de l’archipel austral ne donnaient que de rares palmiers aux troncs gigantesques plongeant leurs racines dans un sol parcimonieux où le sable l’emportait sur la terre. Il avait fallu sans trêve étendre les polders pour arracher à l’eau salée des lieux de vie où respirer, s’alimenter, dormir, se reproduire et étudier au sec. Les trimeurs s’attelaient à la poldérisation avec une fatalité d’esclave. Plongeant pour extraire du fond de l’océan le sable que d’autres trimeurs transformaient en hydraplast ou en terre artificielle. Se tuant littéralement à la tâche. Y perdant la santé. La plupart du temps trop abrutis et harassés pour se révolter.



Et Toulouse, macarel !

Quoi de plus naturel de parler de sa ville, d’y planter le décor de ses romans, d’y faire vivre ses personnages, quand on est auteur, ou aut...