Un simple H aspiré sépare les héros des zéros. Si le thème m’a inspirée c’est qu’il a fait l’objet d’un débat animé sur Facebook avec une citation de je ne sais plus qui, à savoir que la jeunesse se devrait d’être héroïque.
De jeunes
héroïques, la terre de Verdun et d’ailleurs en regorge. Étaient-ils d’ailleurs
héroïques, ces jeunes gens faits pour l’amour qui montaient au casse-pipe,
l’esprit capitonné par des cocktails de drogues ? Une guerre des tranchées
fait rage en ce moment même et, des fossés d’Ukraine, émergent des têtes
blanches qui n’auraient jamais pensé risquer leur peau à l’âge où on prend la
retraite.
L’héroïsme
n’est d’ailleurs pas l’apanage de la jeunesse. À Toulouse, la Résistance
comptait, entre autres figures héroïques, une jeune fille de 18 ans, Angèle
Bettini Del Rio, un homme dans la fleur de l’âge, Forain
François Verdier, qui refusa de parler sous la torture, et une vieille dame,
du réseau Françoise, d’après son nom
de Résistante, dont Greg Lamazères a campé l’action héroïque dans La
vieille dame du war office.
Quant
aux zéros, il est possible qu’ils pullulent, quoique des circonstances extrêmes
soient à même de transformer un z en h.
Et
la littérature dans tout ça ? Et surtout la seule dont je puisse parler de
l’intérieur : la mienne. Combien de héros et d’héroïnes ? Combien
d’anti-héros ? Je n’ai jamais fait le compte des divisions de fantassins
et de cavaliers que j’ai expédiés sur le front à la seule fin de prendre
d’assaut l’intérêt des lecteurs.
Laissons
de côté la SF (Poussière de sable
étant épuisé sans avoir renoncé à renaître) et Elwig de l’Auberge Froide dont l’héroïne de cape et d’épée a été
largement commentée dans le blog.
Tournons-nous
vers Diabolo pacte dont les
protagonistes évoluent dans un milieu très sélectif : l’édition. Prenons
Garin Bressol, ainsi prénommé en hommage à un village situé dans l’ascension du
col de Peyresourde. Notre Garin, gnome boiteux et prof de français dans un
collège de banlieue, s’attaque à l’Himalaya : faire publier sa science-fiction.
Las ! Il essuie et les lettres de refus des éditeurs et les quolibets de
ses élèves. Heureusement, le Diable a plus d’un tour dans son sac à malices et
a tôt fait de transformer notre prof martyre, par la grâce d’une fronde
virtuelle, en don Juan et en éditeur à succès.
Tournons-nous
vers Coup de grain et sa nouvelle Alexander the Great. Largement romancée,
l’histoire est née de la nécessité que j’éprouvais depuis des années de rendre
hommage à un véritable héros. Américain et anonyme, je l’ai prénommé Alexandre,
comme le Grand, ce grand homme qui, dans les eaux glacés du Potomac où un avion
de ligne s’était crashé, avait maintes fois refusé son tour d’hélitreuillage au
bénéfice de passagers et de passagères qui ne lui étaient rien, mais lui
parurent plus importants que sa propre peau à l’occasion de cette situation
extrême à la vie à la mort.
Des
flots d’encre peuvent couler sur le sujet, inépuisables. L’anti-héros est-il
plus fascinant que le héros ? Quant à l’humble locomautrice que je suis,
elle en est venue au constat qu’un héros trop parfait peut barber. Des zones
d’ombre et de petites ou grandes lâchetés lui donnent de la densité. Quant aux
anti-héros, il peut faire roupiller le lecteur à force d’échecs et de défaites
attendus. Qui sait ce dont ils sont capables ? Même pas leur auteur !