Ce que j'écris, pourquoi, pour qui et les surprises de mon parcours littéraire

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lundi 29 janvier 2024

Comfort or not comfort

En bon français, je vous parle aujourd’hui d’un sujet très bien défini par l’expression confort de lecture, employée par Maryse Carrier, présidente du concours des Arts Littéraires. Les littératures de l’imaginaire, notamment la science-fiction, tireraient le lecteur, hormis les amateurs du genre, de leur zone de confort.

Quand j’ai reçu en mars 2023 la mention spéciale du jury pour Poussière de sable, Légendes ourdiniennes, j’ai sauté de joie, autant pour moi qui en suis l’auteur que pour la science-fiction en général. Je salue les jurés qui se sont, pour la plupart d’entre eux, enhardis hors de leur zone de confort.

Ma saga a eu l’heur de plaire aux amateurs du genre, notamment un lecteur dont la bibliothèque rassemble 1500 œuvres de SF, mais aussi des personnes qui n’avaient jamais lu un roman de science-fiction de leur vie. Certes, les couvertures sont splendides et parlantes, mais ce qui a motivé leur acquisition fut le lien d’amitié avec ma personne et/ou la confiance en ma prose suscitée par la lecture de Diabolo pacte et de Elwig de l'Auberge Froide.

Une de mes lectrices s’est étonnée qu’il puisse y avoir des histoires d’amour, de haine ou d’amitié, de pouvoir entre des personnages qui sont des extraterrestres. Je m’en suis expliqué à maintes reprises : un auteur de science-fiction est un funambule avançant sur la corde raide. Il doit à la fois faire toucher du doigt la notion d’étrangeté et d’altérité absolue tout en suscitant des émotions et des sentiments à l’égard de ses extraterrestres : amour et haine, admiration et mépris, compassion et crainte. Ma lectrice se déclarait somme toute ravie d’être sortie grâce à moi de sa zone de confort.

Pour être romancière, je n’en suis pas moins lectrice et humaine, et apprécie mon petit confort et même mon great comfort, petit clin d’œil à l’humour très british d’Alphonse Allais.

Confidence : j’aime la science-fiction, mais suis plutôt imperméable à la fantasy. Je n’ai pas d’attrait particulier pour les histoires de vampires. Je les fuis.

Or, de passage dans une bibliothèque associative, voilà qu’on m’offre une trilogie de Guillermo Del Toro et Chuck Hogan dont les responsables ne veulent pas. De prime abord, je refuse le présent, en l’occasion trois beaux livres édités par France Loisirs, puis finit par accepter. Je les expose dans ma bibliothèque où ils auraient pu s’empoussiérer sans ne jamais s’ouvrir. Mais que risquerais-je à quitter ma zone de confort ? Tout au plus d’être assommée d’ennui.

Donc, un soir, je commence le premier tome et me surprend à m’assener les mêmes remarques que jadis la lectrice de mon Poussière de sable. La lignée a en effet le don d’éveiller ma curiosité à l’égard de phénomènes étranges s’amplifiant au fil des pages et de susciter mes émotions et mon empathie vis-à-vis de personnages avec lesquels je me sens des affinités.

Et puis ces vampires ne s’abreuvent-ils pas d’un élément qui, dans notre inconscient, aurait valeur de symbole et d’archétype : le sang. Le corps humain n’en contient que 5 litres. C’est dire si ce liquide est précieux ! Rien d’étonnant à ce que sa couleur, le rouge, symbolise le principe de vie.



jeudi 17 août 2023

Deux tomes et des poussières

Si vous me connaissez un tant soit peu, vous vous en doutez : je n’ai pas l’habitude de glisser la poussière sous le tapis, fût-elle de sable. D’ailleurs, chez moi, il n’y a pas de tapis. Pour tout dire, je suis sur le carreau.

Que je vous rafraîchisse la mémoire : Poussière de sable, c’est mon odyssée de l’espace à moi, ma saga de SF déclinée en quatre volets, bref une ambition de tétralogie. Mais une ambition sérieusement freinée par les circonstances. En effet, après avoir publié L’épopée euskalienne et Légendes ourdiniennes, mon éditeur a mis la clé sous la porte, ne se sentant pas de repartir à zéro après la période covidienne. RroizZ est mort, vive le néant, car il n’y a pas de successeur pour reprendre ses collections.

Toutefois, Poussière de sable était écrit depuis juin 2005. Ne me restait plus qu’à retravailler pour le scinder en 4. Avant que mon éditeur n’annonce sa fin, j’avais déjà bouclé le 3ème volet. En relisant le texte initial, que je redécouvrais comme s’il était d’un autre, j’allais de surprise en surprise. Cette société totalitaire où la science est interdite d’audace mais utilise des cobayes humains au service des huiles me rappelait quelque chose. MAIS QUOI ? Je vous laisse supposer.

Désormais sans éditeur pour prendre la relève, je me suis toutefois attelée au 4ème et dernier volet que je viens d’achever et qui réserve un ultime rebondissement.

Poussière de sable paraîtra-t-il un jour dans sa totalité ? Rien n’est moins sûr quand on connaît la dureté du milieu et ses exigences.

Pour le moment, ce n’est pas mon principal problème. Récemment je me suis pourtant amusée en remarquant que ma tétralogie embrassait effectivement les 4 éléments : l’air pour L’épopée euskalienne parcourue de vaisseaux de verre transgalactiques, l’eau pour les Légendes ourdiniennes où prospère une civilisation aquatique de primates évoluant vers le mammifère marin, la terre pour Chroniques de Dafnigrad étouffant sous la poussière de suie, et le feu qui se réserve la fin de l’histoire.

Si je continue vous allez imaginer y trouver votre horoscope personnalisé.

 



jeudi 3 mars 2022

Mon père, ce héros… qui m’a appris à mentir

 Si ma mère me tenait grand ouvertes les portes de l’étrange et de l’invisible, mon père quant à lui se gaussait littéralement de l’ésotérisme. Il disait de sa belle-mère que si elle avait vécu 5 siècles auparavant elle aurait fini sur le bûcher comme sorcière. Ce qui est paradoxal c’est qu’en tant que sculpteur-peintre, il produisait des œuvres s’apparentant au réalisme fantastique. J’ai d’ailleurs adressé aux éditeurs des manuscrits avec, pour illustration, l’une de ses tableaux.

Un seul coup d’œil suffit pour saisir ce que mon père m’a apporté. Je pense que j’écris comme il peignait : en enrobant de fantastique les contours du réel, si ce n’est que je puise dans les mots les couleurs et les formes qui façonnent mes mondes imaginaires.

Papa m’a donné un seul conseil pour les rédactions hebdomadaires qu’on commandait aux écoliers sur des sujets du style narrer une journée de vacances, une dispute, etc.  Il me martelait : il faut mentir, ce qui voulait dire qu’il fallait éviter de raconter sa vie, mais tout inventer.

Je me suis mise à habiter des villas et des châteaux alors que nous logions dans un clapier, à avoir des loisirs que mes parents n’auraient jamais pu m’offrir, comme l’équitation et la plongée sous-marine. Mon père jubilait de voir ses conseils approuvés par les bulletins scolaires. Il faut mentir, mentir, répétait-il.

En tant que romancière, je pense avoir largement dépassé ses espérances.

Manuel Candat

Manuel Candat, Sortilèges, 1979

 

vendredi 25 février 2022

Ma mère qui m’a ouvert les portes de l’étrange

 

Lu sous la plume de Pierre Bellemare qui, des décennies durant, a collecté des histoires vraies coiffant l’imagination la plus débridée sur le poteau : Un romancier parle toujours de lui-même quand il écrit sur une petite fourmi. Petit clin d’œil à Bernard Werber en passant. Mais comment concilier Pierre Bellemare et Victor Hugo selon lequel Le moi est haïssable ?

Le seul cas que je connaisse de l’intérieur étant le mien, je n’irai pas par 4 chemins. Encore aujourd’hui, j’ignore si mon premier essai romanesque, Poussière de sable, se réfère à mon autobiographie et à vrai dire je m’en moque. Je me suis attachée avec passion à mes personnages extraterrestres, gogorkis qui nous ressemblent ou euskaliens ailés aux pouvoirs psy. Qu’on ait trouvé mes personnages attachants me remplit de joie. Une part d’eux-mêmes émane-t-telle de mes expériences de terrienne née sous le signe du taureau ? Sans doute.

Ce que dont je suis sûre, c’est que si je me suis orientée naturellement vers l’imaginaire, sans avoir l’idée de rectifier le tir, c’est que mon héritage était lourdement chargé.

Poussière de sable s’ouvre sur L’épopée euskalienne, dédiée à ma mère. Le livre est sorti au moment où Maman déclarait le cancer sanguin qui allait l’emporter 9 mois plus tard, exactement le temps d’une maternité.

Ma mère était medium. Elle pouvait circuler dans une brocante et être prise de malaise face à une armoire imprégnée de secrets. Quand j’étais enfant, je l’ai vue rentrer dans un état d’excitation extrême et décrire à mon père qui elle venait de rencontrer. Ce n’était ni le crémier ni la boulangère mais sa grand-mère défunte. Autrement dit, et surtout depuis le retour de ma grand-mère astrologue et voyante, l’extraordinaire faisait partie de mon ordinaire. Cependant, je n’ai jamais souhaité expérimenter des phénomènes qui me paraissaient terrifiants : bourrasques traversant une chambre fermée, sensation d’une main glacée sur la joue attribuée à la présence d’un cher défunt, transes dont on peine à sortir, j’en passe car il faudrait un livre.

Ma mère fut ma première lectrice. J’avoue que la première version de Poussière de sable était dure à avaler, pour ne pas dire imbittable. Eh bien ! Maman y est entrée comme dans un décor familier. Ses encouragements m’ont incitée à persévérer et à remettre l’ouvrage sur le métier, jusqu’à la version finale, que vous avez eu, ou aurez, la curiosité de découvrir. Hélas ! Maman n’a pas eu le temps de finir le livre-papillon qu’elle avait lu de bout en bout à l’état ingrat de larve tapuscrite.

Comme nous sommes en plein moi, la prochaine fois, je vous parlerai de mon père.

Mère et fille, salon du Livre de Tarascon-sur-Ariège, 2010


Le réel, y a que ça de vrai !

Fictionnaire de l’écriture, j’ai débuté par des histoires absurdes que presque personne n’a lues pour la simple raison qu’elles sont demeuré...