Ce que j'écris, pourquoi, pour qui et les surprises de mon parcours littéraire

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mardi 31 octobre 2023

Bankable or not bankable ?

Quand un auteur, publié notamment au Cherche Midi, ayant signé une vingtaine de livres dont certains parus en poche, m’a annoncé qu’il donnait son dernier roman à L’Harmattan, je suis tombée à la renverse. Au sens figuré seulement. Au sens propre je vais bien, exceptée cette sensation poisseuse que cet écrivain et ami salissait quelque part son nom. Bien sûr, il a dépassé les 80 berges et connaît quelqu’un chez cet éditeur. Bien sûr, une éditrice d’une grande maison prestigieuse, ayant apprécié l’ensemble de son œuvre, l’avait encouragé à écrire ce dernier roman dont elle s’occuperait personnellement quand un coup de théâtre tragique, comme la vie en a le secret, éjecta la femme providentielle de la scène éditoriale.

Certes, L’Harmattan a pu mettre le pied d’auteurs débutants à l’étrier – c’est là son mérite – mais c’est un éditeur qui ne verse de royalties qu’à compter du 501ème exemplaire vendu. Donc, dans 99% des cas, il ne paye rien, mais empoche la somme que les auteurs versent à l’éditeur pour l’achat d’exemplaires à écouler dans les salons quand les amis et la famille ont fait le plein. Même avec la remise sur le prix public du livre, l’éditeur en retire un bénéfice puisque le coût de la fabrication et de l’impression est inférieur à ce prix public.

Bien sûr, j’achèterai le livre de mon ami et le lirai avec attention et intérêt.

Toutefois, cette nouvelle me laisse quelque peu pensive quant au monde éditorial qui se montre parfois bien péremptoire. En qualité de locomautrice, j’ai de quoi fumer. Trois gros remarquent le manuscrit de mon 2ème roman, on loue son très bon titre, Elwig de l’Auberge Froide. Au final, personne ne prend pas le risque de le publier. Par bonheur, les éditions Pierre Philippe (ePPh), sises à Genève, s’enthousiasment pour ce roman européen qui sort en 2014. Presque dix ans plus tard, c’est la bonne surprise. Mon thriller franco-allemand est toujours distribué et attire du monde à ma table de dédicaces.

Christian Signol, récipiendaire d’un prix toulousain, m’a conté une anecdote après la cérémonie. Il écrit un roman qui enthousiasme son éditeur chez Albin Michel. Celui-ci lui prédit un succès fou. Et c’est le flop, tandis qu’un autre titre, placé sous des augures bien moins favorables, a fait un tabac à sa sortie.

J’en suis venue à la conclusion qu’en matière de publication la seule boussole devrait être la qualité littéraire. S’il était possible de prévoir les succès commerciaux en tâtant les manuscrits, nous serions tous, auteurs et éditeurs, milliardaires. Oui, je le dis et le répète : l’unique boussole devant guider l’éditeur dans ses choix de publication devrait être la qualité littéraire.

Tout le reste est littérature !

Librairie Privat, Toulouse


jeudi 5 mai 2022

Elwig de l’Auberge Froide, un roman européen né du cylotourisme

 Si je n’écrivais pas, je ne bayerais pas pour autant aux corneilles et si je laissais le vélo au garage, je voyagerais autrement, dans un fauteuil, face à l’écran, mes mains passant instantanément du guidon-papillon au clavier azerty. Je partage le temps non dévolu au quotidien entre mes deux passions : le vélo et le stylo. Je pourrais paraphraser le titre d’une émission culturelle qui a enjambé le siècle : le casque et la plume. Mais comme la vie est par essence poreuse, il arrive fréquemment que le territoire de l’un empiète sur celui de l’autre.

Mon deuxième roman, Elwig de l’Auberge Froide, en est l’illustration. Le vélo y joue le rôle de machine à remonter le temps et l’Histoire. Le récit est né d’un périple réalisé en deux temps. Je peux dire qu’Elwig est fille de la mythique randonnée du Danube. Tout commence en juin 2005 à Colmar sur des randonneuses lestées de sacoches, destination Budapest. Plus de mille kilomètres le long du Danube. Le premier jour, nous avons franchi le massif de la Forêt-Noire. En haut de la Nationale 500 nous attendait un carrefour hérissé de panneaux indicateurs et d’où l’on apercevait une bâtisse imposante, l’archétype des auberges allemandes : L’Auberge Froide qui, depuis 1480, se dresse à la conjonction de trois routes qui descendent dans des directions différentes : Donaueschingen, source officielle du Danube, Fribourg et le pittoresque Titisee sur les berges duquel prospère l’artisanat traditionnel des coucous. François, mon personnage, s’élance à vélo en direction de Vienne. Un orage le contraint à faire halte à l’Auberge Froide. Il pose sa bicyclette dans le garage, s’installe devant une bière et se retrouve, par enchantement, en 1805, dans la peau d’un étudiant en médecine en route pour Vienne. Le décor et la vêture régressent dans le temps : les tonneaux remplacent les chromes de la pompe à bière, la culotte de cuir le pantalon de toile. C’est le cœur du roman, où mènent et d’où partent les vaisseaux d’une histoire qui couvre deux siècles. Les paysages et les villes où se déroulent les péripéties, nous les avons nous-même traversés à vélo. Comme François nous avons épousé Les foucades du jeune Danube qui l’envoie à l’assaut de rampaillons de terre. Comme mes personnages, nous avons circulé à l’intérieur du site enchanteur de la ville de Passau, au confluent de trois cours d’eau, l’Ilz, l’Inn et le Danube. Comme François je suis partie en quête du musée de l’histoire de la psychologie, transféré entre temps à Würzburg.

En 2008, nous avons relié Budapest à la mer Noire, terminus Odessa en Ukraine. Pour parler de la randonnée du Danube, je cède la parole à mon personnage : Je songeai que longer le Danube à vélo, c’était aussi voyager à l’intérieur d’un mythe même si nos ambitions s’arrêtaient modestement à Vienne. Pensez, cher ami, que ce fleuve légendaire naît dans la Forêt-Noire pour se jeter dans la mer Noire, comme si, depuis la source jusqu’au delta séparés par près de trois mille kilomètres, des peuples d’idiomes aussi différents que les Allemands, les Slaves, les Hongrois et les Roumains s’étaient donné le mot, plus précisément, l’adjectif pour nommer sa fin et son commencement. De ma randonnée du Danube, de Colmar à Odessa, n’est pas né le traditionnel récit de voyage mais les rencontres, la découverte ou redécouverte de sites mythiques ou sauvages m’ont donné le déclic pour écrire un roman sur les rapports franco-allemands. Ce n’est pas un hasard si mon éditeur, Philippe Villette des éditions Pierre Philippe, est genevois.

Ce roman est somme toute une histoire de ponts entre les cultures. L’histoire se déroule aussi dans le Midi toulousain et relie le grand Danube au petit Tarn, affluent de la Garonne. J’ai pris pour cadre cette portion de rivière que les cyclotouristes de ma région connaissent bien et qui va de Villemur à Buzet. C’est à vélo que nous avons découvert ces villages des bords du Tarn dotés de ponts suspendus. Lorsque nous partions pour la matinée, nous avions pris l’habitude de casser la croûte devant un établissement désaffecté : le café du pont. Cette bâtisse mystérieuse située face au pont suspendu me faisait rêver. Dans le roman, le café du Pont est devenu l’auberge du Pont : La porte d’entrée en arceau, les portes-fenêtres de l’étage, tout est clos. Le vert des volets tranche sur la brique rouge. (…) Une bâtisse en briques rouges, porte et volets clos, qui se dresse face au parapet.

Je pense que la pratique du vélo m’a donné l’endurance nécessaire pour bâtir des histoires au long cours. Quand on affronte des meutes de chiens roumains, on a le courage de se lancer à l’assaut du monde de l’édition et de persévérer en dépit des obstacles. De même, quand je suis sur le vélo, fascinée par le charme des paysages ou peinant sous l’effort, j’oublie tous mes soucis, y compris les chaos et les bâtons dans les roues de ma carrière littéraire que je souhaiterais en roue libre.

Donaueschingen, naissance du Danube 


L’écriture, un effeuillage mental ?

Drôle d’émotion qui m’étreint à la veille de la parution du recueil de mes poèmes de jeunesse, Mon opium est dans mon cœur. Pour une fois, j...