Donc, un vendredi de décembre, je pénètre dans l’auditorium où le lauréat du prix Mémoire d’oc doit tenir une conférence animée par une modératrice, Monique Faucher de Radio Présence. Jean-Claude Ponçon est déjà installé derrière une pile de livres prête pour la dédicace. Je suis la première à m’emparer du roman primé : Le dernier porteur d'eau. À Claudine qui, la première…
1850 :
Alphonse, 17 ans et Auvergnat « monte » à Paris pour faire porteur
d’eau. Dans ce Paris-mosaïque, il se frottera aux duretés des temps, découvrira
l’amour et saura attraper le coche des transformations sociales, tout ceci
narré dans une langue charnelle et savoureuse.
La
conférence débute et la modératrice tente à plusieurs reprise de l’entraîner
sur un terrain où notre conférencier ne souhaite pas aller : le voyage
d’Auvergne à Paris en 1850. En Effet, à l’époque, ça relevait de
l’épopée ! Gros effet comique dans la salle qui s’esclaffe à plusieurs
reprises. Jean-Claude Ponçon est excellent et, plus tard, chaque fois que je
devrais me coller à l’exercice, je penserais à lui, mon modèle en la matière.
Je pose des questions, intéressée par les arcanes de la création romanesque à
laquelle je me confronte depuis 5 ans, d’abord avec Poussière de sable puis avec Diabolo
pacte. Un lustre, dirons les cuistres, terme on ne peut plus exact
concernant une apprentie-écrivain qui cherche à luire, voire à briller tel un
Jean-Claude Ponçon rompu à l’art de la conférence.
Ensuite
le prix est remis par le directeur de la CRAM, le future Carsat. Il s’agit d’un
chèque égal au montant du plafond de la sécurité sociale. Jean-Claude Ponçon
n’est pas « descendu » pour rien de sa Beauce natale. Mais, au-delà
de l’aspect financier, un auteur couronné d’un prix littéraire a toujours
l’impression d’être le roi. Et le roi régale d’un menu concocté par un traiteur
et qui fait la part belle aux spécialités auvergnates.
Jean-Claude
Ponçon, derrière la table de dédicace, signe à tours de bras, souvent à raison
de deux ou trois livres pour une même personne. Son épouse lui passe un plat de
temps en temps. Il faut bien que l’auteur mange pour avoir l’endurance de
dédicacer sans relâche. Moi, l’apprentie, j’attends sagement que le flot des
lecteurs me laisse un intermède pour demander un conseil. Jean-Claude Ponçon
semble intrigué par ma présence et me lance de temps en temps un regard étonné.
Enfin, j’ai l’espace :
―
Je viens d’écrire un roman. Pouvez-vous me donner un conseil ?
À
l’époque j’ai encore la naïveté de ne pas avoir conscience que nous sommes
treize à la douzaine dans ce cas. Ce dont je me rendrais compte plus tard avec
les premiers succès c’est qu’un prix rend enclin son roi ou sa reine à la
bienveillance. Aussi le roi de la soirée me répond-t-il :
―
Pour vous conseiller, il me faudrait lire ce que vous écrivez.
―
J’ai une disquette dans le sac. Je ne l’ai pas fait exprès mais je l’y ai
oubliée.
Et
je suis sincère. Jean-Claude Ponçon
embarque ma disquette avec mes coordonnées.
La
fête prend fin. Des semaines passent. Je suis au travail. Mon téléphone
professionnel sonne et j’entends :
―
Ponçon.
Je
manque tomber du fauteuil. Je lui parle du livre
et du côté de Châteaudun la réponse est cinglante :
―
Mais ce n’est pas un livre !
La voix
se radoucit. Il y a un mais, mais pour une fois dans le bon sens.
―
Mais vous avez du style et c’est bien à vous. Je vous encourage à continuer.
C’est
ainsi qu’est née une amitié et que, forte des conseils et de la confiance de
Jean-Claude Ponçon j’ai pu transformer mon deuxième essai romanesque.
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