Ce que j'écris, pourquoi, pour qui et les surprises de mon parcours littéraire

mardi 28 mai 2024

Inspiré de faits divers

Dans la série, le « dessous des pages » je m’en retourne à Coup de grain et aux faits divers qui m’ont inspiré certaines histoires. Parmi les dix, je demande la nouvelle qui donne son titre au recueil et la n° 7, Alexander the Great.

Cette dernière me taraudait depuis des années avant que je ne la mette à exécution. Depuis ce jour des années 90 où j’entendis parler à la radio d’un accident d’avion à Washington : un engin se crashe dans les eaux du Potomac, un hélicoptère est dépêché pour hélitreuiller les passagers, un homme, à chaque fois, cède son tour et, à bout de force, finit par couler. Il ne fera pas partie des survivants. Un homme dont on ne dévoile ni le nom, ni la profession ni l’âge. À mes yeux cet homme est un héros, un héros qui a sacrifié sa vie pour celle des autres et son acte d’héroïsme n’a cessé de m’obséder. J’ai transposé le fait divers à Chicago, l’avion se crashe dans le Michigan et j’ai donné à mon héros anonyme la vie qu’il n’a sûrement pas eue. Laquelle ? Je serais bien bête de vous le dire alors qu’il est de mon intérêt de fictionnaire que vous lisiez la 7ème nouvelle de Coup de grain.

Quant à la nouvelle n° 2, elle met en scène des antihéros des deux sexes. Comme l’a écrit Michel Dargel dans sa chronique (Intramuros n° 479) y a même un crime. Mon antihéroïne, je suis allée la pêcher à la télévision, plus précisément dans un reportage qui montrait le sort d’ouvrières licenciées pour motif économique dans une région en voie de désindustrialisation. L’une d’elle avait repris un commerce de lingerie où la clientèle était plus que rare. Seules d’anciennes collègues au chômage passaient en la faisant tinter la porte de la boutique. J’ai été saisie d’indignation à l’idée qu’une cellule de reclassement puisse envoyer les gens au casse-pipe. Dans ma nouvelle, le sort s’acharne sur les déclassés et les pousse aux actes les plus terribles. Il fallait donc saupoudrer d’humour un plat qui a priori se mangerait froid. Mais, en littérature comme en cuisine, l’alchimie mêle le miel à l’acide et édulcore l’amer. Pourvu que ça croustille !




dimanche 19 mai 2024

Vu à la télé

Triste actualité ! Bernard Pivot n’est plus. Grâce à son talent et à sa passion, la littérature crevait l’écran. En ces années Pivot, passer à Apostrophe constituait pour un auteur le saint Graal. Je n’en écrirai pas plus : nombre l’ont fait, et mieux que je ne le ferais. J’en reviens donc à un sujet qui vous fascine : ma petite personne affiliée aux AA (auteurs anonymes).

Le rêve de tout AA de tout sexe et de tout genre, à jeun ou bourré, c’est de se défaire du A d’anonyme et de passer la rampe d’un début de célébrité. Pour faire bref, ils veulent tous passer à la télé même tremblant de trouille à l’idée de rougir et de bredouiller. Patrick Modiano n’emportait-il pas l’enthousiasme de futurs lecteurs qui se ruaient sur son dernier livre dès le lendemain de la diffusion d’Apostrophes : il n’avait pourtant pas réussi à aligner trois mots.

Aujourd’hui, on aimerait bien être invité à la Grande Librairie, et même à la Petite. Un passage sur les ondes nationales : le Graal. Vanité quand on réalise que même un article dans la Dépêche du Midi relève presque du miracle.

C’est d’ailleurs par miracle que j’ai été invitée par Greg Lamazères qui animait une émission sur TéléToulouse. La chaîne bénéficiait, à l’époque de la 1ère édition de Diabolo pacte, d’une large diffusion régionale. Maquillée, tout d’orange vêtue, mon passage fut un succès, si bien que dans les salons du livre, j’ai entendu maintes fois de futurs lecteurs me confier : Je vous ai vu à la télé. Ce qui semblait sanctifier mon Diabolo pacte.

Je suis aussi parvenue jusqu’à Greg Lamazères par miracle. Par hasard, je suis en effet tombée sur le regretté Jean-Jacques Rouch, journaliste à la Dépêche du Midi, et ami de Greg Lamazères. J’ai narré l’anecdote dans un précédent article : https://claudine-candat-romanciere.blogspot.com/search/label/Jean-Jacques%20Rouch.

Quand mon 2ème roman est sorti, j’ai envoyé à Greg l’argumentaire de Elwig de l’Auberge Froide. En retour, j’ai reçu un message enthousiaste : Votre argumentaire est fantastique. Et c’est ainsi que je suis repassée à la télé. Excellent interview avec cette Fille de Jolimont ! pour me présenter. TéléToulouse était hélas moins bien diffusée, mais les retours positifs n’ont pas manqué. Puis l’entreprise a été liquidée.

J’ai découvert avec plaisir la facette écrivain de Greg Lamazères. Hélas ! son dernier livre est paru l’année de sortie de mon 2ème (et non second).



 

vendredi 10 mai 2024

Deux histoires de famille

Le dlog exigeant sa pitance hebdomadaire, je reviens à la gamelle. Ce qu’il y a de commode avec mon Coup de grain, c’est qu’il compte dix histoires dont j’ai prévu de vous divulguer quelques secrets. La 4ème de couverture annonce en effet que je me suis inspirée du réel.

Après avoir évoqué le côté autobiographique, j’élargis la palette aux anecdotes familiales.

Au cœur de Boomerang, un billet de loterie gagnant que le narrateur (un voyou marseillais qui sort de prison) offre à une jeune fille pour la dédommager : il vient en effet de renverser son verre sur sa jupe. Cette mésaventure est arrivée à ma grand-mère maternelle, sauf qu’elle se passait à Oran, que le maladroit était Américain et qu’on était loin du gros lot. Quant à l’Australie (évoquée dans le titre), il me vient du fils cadet de Bonne-Maman. Jamais il n’a pu réaliser son rêve d’émigrer en Australie, contrairement à son frère aîné ayant fait une partie de sa vie outre-Atlantique. Cet oncle d’Amérique pourrait d’ailleurs être un héros de roman.

Un enfant de la balle raconte les aventures d’un enfant qui s’enfuit dans un petit cirque et finit par se produire dans un cirque célèbre. Le petit cirque en question s’installait chaque année dans la friche qui s’étendait au pied de nos HLM et exhibait entre autre un cheval courant sous le chapiteau en portant sur son dos un singe habillé et chapeauté. C’était un évènement et ma mère m’amenait au spectacle le soir après l’école.

Quant au grand cirque, il était très présent dans la mémoire de Bonne-Maman qui avait refait sa vie avec un trapéziste du cirque Pinder, après avoir divorcé d’un champion de gymnastique (mon grand-père). Tombé dans le filet quand son frère n’avait pu le rattraper, il avait été envahi par une peur insurmontable qui l’empêcha de faire son métier. Je porte à mon doigt le rubis dont ma grand-mère avait hérité à sa mort.

Plus que nées de l’envie d’écrire une histoire, ces deux nouvelles constituent surtout un hommage à ces êtres disparus et oubliés, mais qui m’ont marquée au point qu’il me fut nécessaire de les évoquer.




mercredi 1 mai 2024

Les livres aussi ont une peau

Passons de la nouvelle à la poésie, du réel (Coup de grain) au rêve (Mon opium est dans mon cœur. Commençons par la peau, la couverture, avant d’atteindre la pulpe, mes poèmes de jeunesse. Je ne peux que me féliciter d’avoir réussi à les publier à compte d’éditeur. Un grand merci aux éditions IL EST MIDI. Qui plus est, le bonheur de voir une toile de mon père, Manuel Candat, illustrer un élément primordial de tout ouvrage : la première image offerte au public sur un stand de dédicace ou sur la table des libraires et qui, souvent, détermine, l’impulsion d’ouvrir le livre.

D’abord le titre : Mon opium est dans mon cœur, m’est venu récemment, des décennies après que le dernier vers de ma poésie de jeunesse ne fût écrit, en redécouvrant un poème datant de mon adolescence. Ce vers m’a sauté aux yeux et m’a semblé symboliser mes espoirs et mes désarrois d’alors. Aujourd’hui, j’ai évolué : romancière, j’éprouve la sensation de passer mes journées sous mescaline.

Une évidence m’a aussi sauté aux yeux : un tableau de mon père illustrait parfaitement cet opium avec ses couleurs douces jouant sur la gamme du rose sur lesquelles tranche une coupole bleue. Une ambiance orientale s’en dégage enveloppée du parfum des fumeries d’opium. Mais un tableau est comme un livre : chacun le voit différemment selon sa sensibilité.

Papa n’est plus à même d’ouvrir ce livre qu’il a illustré à son insu. Les deux personnes qui auraient conçu de la fierté lorsque le manuscrit (inédit) de Mon opium est dans mon coeur a reçu la mention spéciale du jury des Arts littéraires en mars 2022 ne sont hélas plus de ce monde. C’est aussi pour mes parents disparus que je m’entête au coupe-coupe et à la machette sur le sentier d’une carrière littéraire compliquée, loin du confort d’une promenade de santé.

La carrière de peintre-sculpteur de mon père fut un chemin semé d’embûches débouchant sur des impasses. Exister chez les galeristes est aussi ardu dans les arts plastiques que de percer en littérature, la publication chez un éditeur susceptible d’être diffusé en librairie étant la condition nécessaire.

En attendant sa première sortie en public, je me délecte dans la contemplation d’une première de couverture chargée d’émotion et de souvenirs.

Sortilèges, Manuel Candat, 1979


La bosse du commerce

Un sujet qui intéressera les auteurs exposant leurs œuvres dans les salons du livre, tous avides qu’un de leurs titres trouve preneur. Vous ...