Dans un article publié le 24 mars, je déclarais que le syndrome de la page blanche m’avait, jusqu’ici, épargnée en tant que romancière. Jusqu’à présent, je me réjouissais en effet d’être passée à travers les mailles du filet. Je pourrais même me vanter de noircir l’écran blanc de mon ordi tant je fourmille d’idées. En outre, si je me relis plutôt deux fois qu’une, la rédaction est un exercice au cours duquel je sèche rarement.
En
apparence, de quoi me réjouir. Et puis j’ai déchanté. En me plongeant dans la
littérature, au sens médical du terme, je me suis rendu compte que le fameux
symptôme touchait particulièrement les auteurs foudroyés par un premier succès,
lequel les paralysait au moment de devoir renouveler l’exploit de produire un
second best-seller.
Comme
l’indique ma non-notoriété publique, la foudre m’a évitée. Par contre, c’est mon
premier éditeur qui a été frappé, mais par la faillite. Ça commençait bien pour moi.
Donc,
pour la suite, je n’ai jamais eu la pression, car personne n’attendait
grand-chose. Je peux dire que, même si je bosse comme un âne, j’écris plutôt
relax. Les moments où je crée sont les plus beaux, dispensateurs de joies
fulgurantes.
Ce
qui a douché mes illusions, c’est la mémoire. D’un coup, m’est revenue la
boutade de Louis Jouvet vis-à-vis d’une starlette affirmant qu’elle n’avait
jamais le trac :
―
Ne vous inquiétez pas, ça vient avec le talent.
Qu’importe
si c’est plutôt sorti de la bouche de Sarah Bernhardt. Car, depuis, j’ai des
doutes. Et si le syndrome de la page blanche ne concernait que les auteurs
talentueux ? La question se pose : dois-je continuer à noircir mon
écran et à encombrer les datacenter ?
Louis Jouvet et Simone Renant/Quai des Orfèvres 1947 |
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