Pour y parvenir, le roman historique est le genre idéal.
Mon 2ème roman, Elwig de l’Auberge Froide, ne se
contente pas d’évoquer l’histoire des conflits franco-allemands depuis 1805.
Mon héroïne, Elwig, et mon héros, François-Franz, voyagent littéralement dans
le temps, s’incarnant dans des figures romantiques en proie à la dureté d’un
siècle marqué par les conquêtes napoléoniennes.
Ainsi Elwig Kaminski, l’enfant égarée
à l’hiver 1945 sur les routes de l’Exode et adoptée à l’Ouest par un couple
vieillissant, est-elle soudain submergée par des souvenirs appartenant à la
jeune comtesse Elwig von Sankt Märgen, qu’elle chevauche le superbe Blizzard ou
manie l’épée avec virtuosité. Ainsi François se retrouve-t-il, à la faveur d’un
orage coupant l’électricité de l’Auberge Froide, dans la peau de Franz,
étudiant en médecine en route pour Vienne, une Vienne d’avant la construction
du Ring.
Qui n’a souhaité voyagé dans le
temps ? Elwig de l’Auberge Froide exauce
ce souhait et décrit comment tout cela est non seulement possible, mais vrai.
Nul besoin de machine à remonter le
temps, à moins que ce ne soit un simple vélo. Un orage, une chute de bicyclette
ou de cheval, et l’incroyable survient. L’Auberge Froide s’éclaire à la bougie,
des officiers français, hier vainqueurs à Iena, souffrent le martyre lors de la
retraite de Russie.
La preuve par le
livre : Alors je
quittai la demeure sur la pointe des pieds, avisai le long du mur une étrange
machine de fer montée sur deux roues. Son usage ne m’était pas tout à fait
inconnu. L’idée me vint de l’enfourcher pour fuir au plus vite le lieu du
crime. Mes brodequins se calèrent dans les étriers. Je n’eus qu’à peser dessus
pour entraîner l’engrenage qui mouvait la roue arrière, et je me mis à voler le
long du chemin de halage, comme sur un cheval lancé au galop. Mon passage ne
passait point inaperçu. Les mariniers et les pêcheurs juraient, tandis que les
femmes se signaient par réflexe.
Je me rendis compte que j’incarnais à leurs
yeux une espèce de centaure couvert de sang, une chimère sortie de
l’imagination d’un diable. Moi, je n’en avais cure. Je m’enivrais de vitesse et
de liberté car posséder une telle machine signifiait ne plus dépendre d’un
animal pour avancer cinq fois plus vite qu’à pied. J’avais trouvé les bottes de
sept lieues, sauf qu’elles avaient la forme d’un cheval de fer.
Voilà le privilège du
fantastique.
Intrinsèquement, le passé possède
le pouvoir magique de nous immerger dans un monde inconnu qui fut la réalité de
contemporains disparus depuis plus ou moins longtemps. Puisque j’évoquais
tantôt la Vienne où vous n’avez jamais mis ni le pied ni la roue, je vous offre
une nouvelle preuve par le livre : Mais en ce mois de janvier 1822 Vienne est sous la neige et des courants
d’air glacial parcourent les rues jonchées de corbeaux tombés morts en plein
vol. Les turnes sans feu des faubourgs se transforment en chambres mortuaires.
Les hôpitaux se remplissent d’agonisants de tous âges et de tous sexes. Même à
trois ou quatre par lits, on trébuche sur des corps étendus à même le pavé.
Franz se démène jour et nuit en maudissant son impuissance. Il n’a pas plus de
pouvoir sur le temps, ce Teufelswetter, que sur la misère qu’il soulage
pourtant comme la goutte d’eau désaltère en plein désert un palais asséché.
Vous l’aurez compris : avec
ou sans un zeste de fantastique, le roman historique me passionne à double
titre : celui de lectrice et celui de locomautrice. Je vous
donne rendez-vous au prochain article dont j’ignore à ce jour le thème.
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