Ce que j'écris, pourquoi, pour qui et les surprises de mon parcours littéraire

jeudi 4 mai 2023

Page blanche et idées noires

Dans un article publié le 24 mars, je déclarais que le syndrome de la  page blanche m’avait, jusqu’ici, épargnée en tant que romancière. Jusqu’à présent, je me réjouissais en effet d’être passée à travers les mailles du filet. Je pourrais même me vanter de noircir l’écran blanc de mon ordi tant je fourmille d’idées. En outre, si je me relis plutôt deux fois qu’une, la rédaction est un exercice au cours duquel je sèche rarement.

En apparence, de quoi me réjouir. Et puis j’ai déchanté. En me plongeant dans la littérature, au sens médical du terme, je me suis rendu compte que le fameux symptôme touchait particulièrement les auteurs foudroyés par un premier succès, lequel les paralysait au moment de devoir renouveler l’exploit de produire un second best-seller.

Comme l’indique ma non-notoriété publique, la foudre m’a évitée. Par contre, c’est mon premier éditeur qui a été frappé, mais par la faillite. Ça commençait bien pour moi.

Donc, pour la suite, je n’ai jamais eu la pression, car personne n’attendait grand-chose. Je peux dire que, même si je bosse comme un âne, j’écris plutôt relax. Les moments où je crée sont les plus beaux, dispensateurs de joies fulgurantes.

Ce qui a douché mes illusions, c’est la mémoire. D’un coup, m’est revenue la boutade de Louis Jouvet vis-à-vis d’une starlette affirmant qu’elle n’avait jamais le trac :

Ne vous inquiétez pas, ça vient avec le talent.

Qu’importe si c’est plutôt sorti de la bouche de Sarah Bernhardt. Car, depuis, j’ai des doutes. Et si le syndrome de la page blanche ne concernait que les auteurs talentueux ? La question se pose : dois-je continuer à noircir mon écran et à encombrer les datacenter ?

Louis Jouvet et Simone Renant/Quai des Orfèvres 1947


lundi 24 avril 2023

ChatGPT : nouveau, vraiment ?

 Certes, ça fait clavarder sur les réseaux sociaux. Après les photos de chats, le fameux chatGPT. Je résume : l’intelligence artificielle pourrait remplacer les écrivains. Nous lirions alors des fictions conçues et rédigées par des algorithmes, et la créativité humaine passerait à la trappe. Le lecteur perdrait forcément au change.

Mais, dans la surproduction littéraire, n’y-a-t-il pas déjà pléthore de produits formatés, de resucées de moins en moins goûteuses alimentées par un premier succès décliné jusqu’à l’usure ? Élimées jusqu’à la trame, si bien que le lecteur sait ce qu’il trouvera en tournant les pages. C’est peut-être ce qu’il attend : s’immerger dans un monde dont il ne se lasse pas, qu’importe que l’eau du bain ne soit pas renouvelée. Grenouiller dans la crasse artistique, n’est-ce pas déjà un luxe ?

D’un autre côté, voilà qu’on réécrit les œuvres afin de les « délivrer » des scories qui pourraient blesser quelque sensibilité minoritaire. Au sortir de l’entonnoir, de la bouillie pour chat, sans odeur et sans saveur.

En ce qui concerne les nouveautés, il faut bien se montrer éveillé et se mettre à la mode woke en introduisant des personnages issus de minorités de tout poil. Si j’ose dire, au risque que le mot ne soit connoté homme cis-genre.

Lire en demeurant en éveil permet de mettre à jour des phénomènes qui peuvent faire le 3 en 1 : surgelé édulcoré nappé de sauce woke. Et si on cherche, on trouve !

Personnellement, je suis rassurée à la perspective que Diabolo pacte et Coup de grain sortiront des presses bruts de décoffrage.



 

 

lundi 17 avril 2023

Les régionaux de l’étape

Quand j’entends parler d’auteurs régionaux, je sors mon révolver… à encre. Qu’est-ce qu’un auteur régional ? La définition tombe sous le sens : c’est un auteur qui n’a pas percé. Parce-que tous les auteurs sortent de quelque part, d’une ville, d’une région, d’un lieu-dit. Pour ne citer que nos glorieux anciens, Guy de Maupassant était normand, Colette berrichonne, Jean Giono enraciné à Manosque, j’en passe et des meilleurs.

En quoi certain prix Goncourt serait moins local que moi, née à Toulouse comme lui, auteureuse entre autre de romans européens et d’une saga de science-fiction ? La différence se situe dans la réussite et là, c’est le grand écart. J’en suis toute courbatue.

Certains libraires nous font une petite place sous l’étiquette « auteurs régionaux », car ils méritent un petit filet de lumière, ces pauvres obscurs, des fois qu’une de leurs connaissances, plus ou moins lointaines, serait prise d’une pulsion d’achat. Bien sûr j’ironise.

Je suis en effet reconnaissante du soutien de libraires lors de la parution de mon 1er roman et de la sortie du 2ème. À l’époque, la librairie Privat avait mis à l’honneur Elwig de l’Auberge Froide au point de l’exposer parmi les Incontournables.

Pour l’anecdote, je précise que ce thriller franco-allemand se déroule outre-Rhin et chez nous. L’histoire commence à la morgue de Toulouse et se poursuit dans une boucle du Tarn (l’affluent de la Garonne) entre Villemur et Buzet-sur-Tarn. L’Auberge Froide, qui existe bel et bien en Forêt-Noire depuis le 16e siècle, a son pendant au bord du Tarn : le Café du Pont, désaffecté depuis des années, situé face au pont de Mirepoix-sur-Tarn qui s’est écroulé le 18 novembre 2019 sous le poids d’un camion.

Bref, loin de renier mes origines occitanes, je revendique une inspiration allant au-delà de la langue d’oc, jusqu’aux dialectes germaniques et aux modes de communication extraterrestres.

Et pour faire le lien avec ma pratique du vélo (cyclotouriste toujours, cylcloroutarde aux grandes occasions), malgré les cahots et les ornières, je ne me contente pas d’être la régionale de l’étape, mais je rêve encore de faire la course devant avec un léger zeph de notoriété dans le dos.

 

Sur les côteaux de Montgiscard

 

samedi 8 avril 2023

Des nouvelles de mes nouvelles

Ça bosse fort aux éditions Auzas. Relecture, mise en page avant le BAT (bon à tirer). Bref, la parution de Coup de grain est imminente et c’est une bonne nouvelle. Je profite de ce temps d’attente pour parler de ma relation aux nouvelles, non de l’actualité, mais du genre littéraire : récit court avec chute ou pas chute. Je me soucie peu de ces règles, j’écris à l’instinct.

Dans ce recueil de nouvelles, il en est une datant du siècle dernier. Les autres sont parallèles aux premières tentatives de publication de mes romans. Je les ai bouchonnées, tels des chevaux de course destinés à remporter le jack pot des concours de nouvelles. Mon objectif premier n’était pas de toucher des sous, mais de me faire ouvrir des portes après en avoir reçu une série sur le nez.

Lâchons l’info tout de suite : aucune de mes candidates n’a remporté la palme d’un concours. Cependant, j’ai pris goût à l’exercice, suffisamment pour aligner une dizaine de titres. Si les sujets sont variés, tous ont un point commun, celui d’avoir jailli d’une émotion personnelle, d’ordre privé ou provoqué par la connaissance d’un fait divers. Bref, je n’ai jamais rien écrit de si intime.

En 2022, j’ai au compteur 4 romans publiés et l’immense fierté de recevoir la mention spéciale du jury du concours des Arts Littéraires pour un recueil inédit de mes poèmes, Mon opium est dans mon cœur. Lors du cocktail, 2 personnes des éditions Auzas me racontent qu’elles lisent chaque texte à voix haute. Étant moi-même adepte du gueuloir et du bistrot, comme Flaubert, je suis séduite et téléphone au sujet de mes poèmes. La maison aime certes les poètes mais ne les publie pas mais, par contre, mon recueil de nouvelles pourrait l’intéresser.

J’envoie et reçois plusieurs semaines après une réponse positive. Débute alors un travail très en vue de la publication et, cerise sur le gâteau, un tableau de mon père illustrera la couverture.

En effet, un recueil de nouvelles est, à mon goût, un assortiment de friandises sucrées-salées, douces amères, acidulées, saisi à la flamme de l’inspiration et à même de rassasier les appétits. Comme le roman, la nouvelle raconte de belles histoires. N’est-ce pas là la principal ?

Manuel Candat, En solitaire


 

 

 

 

mardi 28 mars 2023

Un prix qui rapporte de l’or

Donc je me réservais pour une actualité imminente constituée de 2 publications prochaines et d’une remise de prix encore plus prochaine, puisqu’elle a eu lieu pas plus tôt que samedi 25 mars.

Que mon dernier roman publié, Poussière de sable, Légendes ourdiniennes – qui a perdu son éditeur – ait été remarqué par le jury des Arts Littéraires, voilà du baume pour mon cœur de locomautrice, peu enclin à l’optimiste, pour ne pas dire que, par moments, je broie du noir… d’encre.

Donc j’arrive dans le hall de l’espace Lauragais quand une personne m’aborde en me demandant si je la reconnais. Bien sûr que je la reconnais ! Mais, n’étant pas physionomiste et craignant de me tromper, j’hésite jusqu’à ce qu’elle prononce son nom. Pour une fois, je ne m’étais pas trompée. C’était bien Cathy, Cathy avec qui j’ai fait mes études d’allemand à Toulouse et avec qui j’ai partagé un appartement à Vienne, en ce temps béni de notre jeunesse où, s’il nous était apparu dans un miroir méphistophélique, le futur, notre présent, nous aurait semblé atrocement absurde et dystopique.

La dernière fois où nous nous étions vues remontait à plus de 30 ans. Que de souvenirs échangés ! Celui qui fait le plus fureur nous renvoie à Vienne, au mois de mars, un mois de mars viennois où la neige est plus d’actualité que les massifs de pâquerettes. Nous visitons le château de Schönbrunn, le Versailles autrichien, enfilant la visite de pièces de musée dotées d’immenses poêles en faïence. Un trio composé de 2 toulousaines et d’une Allemande, Mathilde, rencontrée en Tchécoslovaquie en université d’été. L’air du parc nous donne un coup de fouet, au point de nous donner l’idée lumineuse de marcher sur l’eau gelée du bassin de Neptune. Mais la glace craque et Cathy s’enfonce jusqu’à la taille. Mathilde et moi, au sec, nous rions comme des bossues et encore plus quand nous apercevons un vieillard interloqué par le spectacle. Il a sûrement connu l’Anschluss, peut-être les affres de la Grande Guerre, mais jamais pareil sacrilège. Dans le tramway le loden de Cathy dégouline. Quand elle marche elle a la sensation d’avoir des poissons dans les bottes. Et pourtant, pas le moindre rhume ni coup de froid. Le soir, j’entends Mathilde s’exclamer au téléphone :

Hier ist es Prima !

Sûr que c’est super. Pendant des années, je me suis mise à rire toute seule rien que de me rappeler la scène du Neptunbrunnen.

Bon, si vous croyez que ces retrouvailles avec Cathy m’ont renvoyée à mon intérêt passionné pour les synchronicités chères à Carl Gustav Jung, vous êtes loin d’avoir tort. Bien sûr, le fait que la présidente des Arts Littéraires soit germaniste n’est que pure coïncidence.

 

Château de Schönbrunn à Vienne

vendredi 24 mars 2023

Page blanche : les bloggeuses aussi !

Sur l’écran blanc d’un ennui noir, je peine à trouver mes mots. Il faut croire que le syndrome dit de la page blanche ne m’affecte qu’en cet organe précis de ma biologie littéraire : le blog. Un de mes rouages de locomautrice est grippé et refuse de repartir.

En décembre 2021, quand j’ai mis en place ce blog pour parler à mes lecteurs, anciens, présents et futurs, je m’étais dit que je publierais un article une fois par semaine. Mon éditeur (RroyzZ éditions) m’avait même dit que l’idéal, c’était 2 fois par semaine. Longtemps, j’ai tenu mon engagement : un article par semaine sur des sujets qui débordaient largement la littérature et ma personne d’auteur. L’actualité m’a aussi fourni des sujets, à savoir que j’ai éprouvé la nécessité de m’exprimer sur la question : l'autofiction, les injonctions à baisser le chauffage (l’écrivain télétravaille), la féminisation à outrance du vocabulaire, version actuelle de querelles byzantines autour du sexe des anges. Mais, là, nous frôlons dangereusement un autre sujet brûlant.

Et pourtant les choses à dire sur ce blog vont se précipiter : la résurrection de Diabolo pacte aux éditions d’Avallon, la parution de Coup de grain, recueil de nouvelles, aux éditions Auzas, mon roman de science-fiction, Poussière de sable, Légendes ourdiniennes, mention spéciale du jury des Arts Littéraires.

Autant de sujets à même de vous éclairer sur mon inspiration et mon parcours de locomautrice.

En ce moment, je travaille sur les BAT (bon à tirer), couvertures (1ère et 4ème) de mes parutions imminentes. Je vous en réserve la surprise.

J’ai provisoirement interrompu l’écriture de mon nouveau roman qui nécessitera de nombreuses recherches et une immersion dans l’inconnu (le passé de notre famille).

Disons que, pour le moment, côté blog, je me réserve.



 

 

dimanche 12 mars 2023

Avez-vous de la chance ?

Un jour, un copain auteur m’a raconté une anecdote au sujet d’un directeur de théâtre (quelque chose comme ça) qui demandait toujours aux postulants :

Avez-vous de la chance ?

Parce que c’est important, la chance, et comme d’acteur à auteur il n’y a qu’une lettre qui change, j’imagine que c’est important pour un auteur, a fortiori une locomautrice.

Donc un éditeur serait inspiré de demander aux auteurs dont ils ont apprécié le foutu manuscrit :

Avez-vous de la chance ?

Parce que, sans une once de chance, une larve manuscrite métamorphosée en papillon par le miracle de la publication ne prendra jamais de lecteurs en ses filets (je plagie mon Diabolo pacte, lequel sera prochainement réédité aux éditions d’Avallon. Un brin de pub ne peut que lui porter chance).

Donc, si vous constatez depuis votre naissance que vous avez la poisse, mieux vaut mentir. Surtout ne pas avouer l’inavouable : qu’à la date prévue pour chacune de vos dédicaces, il tombe des hallebardes (personne ne sort), qu’il fait un temps radieux (personne n’entre), qu’une manifestation passe devant la librairie, que vous êtes malheureux autant au jeu qu’en amour (sinon pourquoi écririez-vous ?). Donc vous déclarez :

Bien sûr que j’ai de la chance.

Et d’étayer :

Quand je veux me garer il y a toujours une place qui se libère dans la minute.

Vous omettez de préciser que vous n’êtes jamais en quête d’une place de parking du simple fait que le permis vous a été retiré pour conduite en état d’ivresse le jour où vous avez appris que votre boss vous virait de sa boîte de merde dont le seul avantage se résumait au minimum vital.

Vous passez sous silence la fois où votre billet de loto était gagnant et que vous l’avez égaré dans la rue.

Ce sont des choses qu’un éditeur n’est pas censé connaître. Donc il est censé vous croire quand vous lui assurez que vous avez de la chance. Mais, s’il est inspiré, il voudra vérifier par lui-même que vous ne lui mentez pas et que vous avez vraiment de la chance.

Donc je lui conseillerais que, nonobstant l’étroitesse de ses locaux, il installe quelques chaises, dont une seule savamment déglinguée, et invite à s’asseoir son candidat ou sa candidate. Je suis bien consciente de plagier l’idée d’un certain Francis Veber mettant en scène, dans un film portant le nom d’un petit ruminant femelle, un Pierre Richard exceptionnellement malchanceux au point de s’asseoir, dans une salle de réunion vide copieusement garnie de sièges, sur le seul qui s’écroule sous lui. C’est très rigolo, sauf que nos éditeurs n’ont pas les moyens des grands espaces.

Pour aggraver mon cas j’avoue que selon l’horoscope chinois je suis du signe de la chèvre, mais que, parfois et, une fois vraiment vitale, j’ai eu ce qu’on appelle une veine de bandit.

C’est une histoire que je vous raconterai un jour. Ou pas.



Vu à la télé

Triste actualité ! Bernard Pivot n’est plus. Grâce à son talent et à sa passion, la littérature crevait l’écran. En ces années Pivot, passer...